Les secours à pied d'oeuvre Durant les premières heures qui ont suivi l'explosion, les bilans étaient provisoires. Mais une source médicale proche de la Protection civile a en fin de compte, estimé qu'il y aurait 15 blessés plus ou moins graves parmi les agents de sécurité. Après plusieurs mois d'accalmie qui ont entraîné une certaine embellie du secteur touristique vital pour l'économie du pays, la Tunisie a renoué hier avec l'insécurité lors d'une attaque terroriste sur la très symbolique avenue Bourguiba, l'artère principale de la capitale du pays. Une jeune femme originaire de la région de Sidi Hcine Sijoumi, dans la banlieue de Tunis, s'est fait exploser hier en début d'après-midi devant le théâtre municipal, à quelques pas d'une patrouille sécuritaire fixe. L'explosion a entraîné les blessures plus ou moins graves de 9 personnes dont 8 policiers. Selon les premières indications, il semble que l'opération a été exécutée au moyen d'une grenade artisanale. L'identité de l'auteure de l'attentat-suicide aurait été très rapidement révélée. Il s'agirait d'une certaine Mouna Kebla, originaire de la localité de Sidi Alouane, relevant du gouvernorat de Mahdia. Agée de 30 ans, elle n'était pas connue des services sécuritaires selon la déclaration aux médias du porte-parole du ministère de l'Intérieur, Sofiene Zaag. Durant les premières heures qui ont suivi l'explosion, les bilans étaient provisoires. Mais une source médicale proche de la Protection civile a en fin de compte, estimé qu'il y aurait 15 blessés au total parmi les sécuritaires. En outre, les commentateurs étaient presque tous unanimes à considérer que l'attentat visait en priorité les membres du service de sécurité stationnés en permanence non loin du théâtre municipal. Un endroit qui a accueilli peu de temps auparavant une marche de protestation dénonçant le meurtre du jeune Aymen Othmani par des agents de la douane. Les enquêteurs ont également confirmé qu'une deuxième femme portant une ceinture explosive était vivement recherchée, sans autre indication. Tandis que le corps sans vie de la kamikaze restait sur place, un important dispositif de sécurité était mis en place, avec l'arrivée de renforts de police sur les lieux et un bouclage de tout le secteur opéré que seules les ambulances de secours parvenaient à franchir. De nombreuses boutiques de cette avenue très commerçante avaient baissé leurs rideaux, aussitôt après l'explosion, et l'incertitude a régné pendant plusieurs heures au fur et à mesure que les informations étaient communiquées par les radios et les réseaux sociaux très réactifs à la nouvelle. Tunis qui avait repris des couleurs ces derniers temps et affichait une volonté de reconquérir son lustre d'antan subit ainsi le premier attentat depuis le 24 novembre 2015 lorsqu'une attaque-suicide avait ciblé un autobus de la garde présidentielle, là encore au coeur même de la capitale, entraînant la mort de 12 agents de protection rapprochée. Cette attaque terroriste avait alors été revendiquée par le groupe autoproclamé Etat islamique (EI). Huit mois auparavant, le 18 mars 2015 exactement, la capitale tunisienne avait vécu une autre attaque commise par deux hommes qui avaient ouvert le feu à l'arme automatique sur des touristes en train de quitter les autocars pour visiter le musée du Bardo, touristes qu'ils ont pourchassés jusque dans les couloirs du bâtiment. Vingt-et-un d'entre eux et un policier tunisien avaient été tués dans cette attaque rapidement revendiquée par Daesh, à l'instar d'un autre attentat perpétré par un kamikaze en juin de la même année sur une plage et contre un hôtel près de Sousse (est), ayant entraîné la mort de 38 touristes. En mars 2016, des dizaines de terroristes s'étaient infiltrés à partir de la frontière tuniso-libyenne pour tenter de s'emparer de commissariats et de casernes de la garde nationale dans la région de Ben Guerdane, au sud du pays. Cette opération terroriste avait fait 20 morts parmi les forces de sécurité et les civils. Si elle n'a pas été formellement revendiquée par Daesh, l'attaque avait alors été considérée par les autorités tunisiennes comme une tentative de l'EI d'instaurer un «émirat» sur le territoire tunisien. Toute cette série d'attaques et d'attentats kamikazes avait impacté gravement le secteur touristique, au point de placer la Tunisie dans une situation préoccupante qui compromettait quelque peu le processus de démocratisation en cours depuis 2011 avec la fin du régime de Zine el Abidine Ben Ali. Ces derniers mois, les dirigeants mettaient volontiers en relief le retour à la normale et se félicitaient d'un climat propice à la relance du secteur touristique qui a vécu effectivement un mieux aller au cours de l'été 2018, et ce malgré une attaque terroriste en plein juillet, dans le nord-ouest de la Tunisie, qui avait coûté la vie à six membres de la garde nationale (gendarmerie). L'essor graduel du tourisme constitue un facteur décisif de la relance économique du pays et le gouvernement s'est fortement employé à renforcer la sécurité des zones touristiques essentielles pour la croissance, n'hésitant pas en cela à recourir à la prorogation répétée de l'état d'urgence en vigueur depuis l'attentat de novembre 2015. Mais si cet état d'urgence permet effectivement d'interdire les grèves et les rassemblements source de désordre, il n'est pas sûr qu'il permette de parer pleinement aux attentats kamikazes que Daesh planifie sans cesse pour saborder les efforts des dirigeants tunisiens.