Ghassan Salamé est venu à Alger les 7 et 8 janvier derniers En prenant conscience de la difficulté de la tâche, depuis une année qu'il est au four et au moulin, le médiateur onusien sait pertinemment qu'il ne suffira pas d'un propos aussi aiguisé soit-il, ni même d'un coup de poing sur la table, pour émouvoir les «autorités de l'Est». Pendant que l'Armée nationale libyenne autoproclamée du maréchal Khalifa Haftar poursuit sa lente, mais inexorable progression vers la frontière tchadienne, après avoir «assaini» la situation dans la région de Sebkha où les milices foisonnent, la situation ne cesse de connaître des soubresauts dramatiques dans la Tripolitaine. A peine calmée avec la conclusion d'un accord fragile, mais respecté, du moins pour le moment, entre les milices qui se sont durement affrontés aux portes même de Tripoli, fin janvier, voilà que le gouvernement d'union nationale conduit par Fayez al Serraj fait état de l'assassinat hier d'un chef local de la sécurité, dans une ville du sud-ouest de la Libye. La nouvelle a été délivrée jeudi par le ministère de l'Intérieur libyen.»Le général Ibrahim Mohamad Kari, chef de la sécurité de la ville de Morzouk, a été assassiné mercredi par un «groupe armé hors-la-loi», a ainsi révélé, dans un communiqué, le ministère de l'Intérieur du GNA, basé à Tripoli. Tout en dénonçant «un acte criminel âche», le ministère a affirmé qu'il entend «poursuivre les auteurs (de cet assassinat) pour les présenter à la justice» et qu'il ne compte pas «rester les bras croisés face à ces crimes qui menacent la sécurité et la stabilité du pays». Les médias locaux ont donné quelques détails sur les circonstances de ce crime, indiquant que Ibrahim Mohamad Kari, appartenant à l'ethnie Toubou, a été assassiné chez lui, mercredi soir. C'est dire si l'atmosphère demeure délétère malgré les professions de foi et les déclarations de bonne volonté des différentes factions, alors que le bras de fer entre les Toubous et les tribus arabes ne semble pas près de s'apaiser. Conscient de cette donne qui rend sa mission particulièrement complexe et difficile, le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, a reconnu, mardi dernier, à quel point il devient nécessaire que la Libye sorte de l'impasse politique, selon un communiqué de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul). Salamé a établi ce constat à la faveur de l'entretien qu'il a eu avec le président de la Chambre des représentants (parlement), établie à l'est du pays, Aguila Saleh. «Le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU, Ghassan Salamé, a rencontré aujourd'hui le président du Parlement, Aguila Saleh, et a souligné à quel point il est important de mettre un terme à l'impasse politique», a déclaré la Manul dans son communiqué. Salamé a jugé essentielle «la volonté de l'ONU de travailler avec tous les Libyens pour unifier les institutions et dynamiser le dialogue politique et les fonctions législatives». Pourtant, en prenant conscience de la difficulté de la tâche, depuis une année qu'il est au four et au moulin, le médiateur onusien sait pertinemment qu'il ne suffira pas d'un propos aussi aiguisé soit-il ni même d'un coup de poing sur la table pour émouvoir les «autorités de l'Est» appuyées par le turbulent maréchal Haftar. Ce dernier, fort de l'appui «désintéressé» de plusieurs capitales occidentales et autres ainsi que du soutien résolu de son homologue égyptien le maréchal al Sissi, qui plus est chef de l'Etat voisin, poursuit une opiniâtre escalade pour contrôler toute la Libye utile avant d'investir, au moment opportun, la Libye politique et administrative concentrée à Tripoli. C'est la principale raison qui fait que la solution de la crise libyenne tarde à voir le jour, surtout que les pays évoqués s'ingénient à en retarder l'échéance à qui mieux mieux, de façon à préserver leurs intérêts futurs. Depuis la conclusion de l'accord de 2015 établissant le GNA de Fayez al Serraj, les rivalités et les divisions n'ont jamais été aussi fortes et l'hypothèque sur la transition démocratique de la Libye aussi tributaire d'un état de violences et d'insécurités sans cesse croissant.