Il y a quelques jours, le gouvernement britannique décidait de réduire le montant des allocations allouées à Abou Qotada, qui, pour donner l'air d'être une victime persécutée, introduisait une requête auprès des tribunaux londoniens. En décidant de ne laisser à Abou Qotada que le «minimum vital» pour faire vivre sa femme et ses quatre enfants, le gouvernement anglais entendait surtout réduire la marge d'activité de cet islamiste radical convaincu. Mais attention, ne vous fiez pas à cette piteuse image que donnait de lui, ce jour-là, Abou Qotada. En fait, vous êtes en présence d'un véritable référent doctrinal des groupes armés les plus radicaux, celui en qui Ben Laden place ses plus grands espoirs en Europe, celui qui aime se définir comme le «guide spirituel du djihad dans les pays du Maghreb», celui, enfin, qui avait, par l'intermédiaire de ses fetwas, légitimé les actions terroristes en Algérie. Ses premiers rapports avec la mouvance islamiste radicale remontent, en fait, à 1990. Abou Qotada venait, alors, de faire de longues pérégrinations au Proche et Moyen-Orient, en Asie, avec des points de chute en Afghanistan et au Pakistan, où il avait exercé au sein de l'organisation du Secours mondial islamique (SMI). Sa vaste érudition, sa connaissance des textes juridiques de la théologie, sa haine du monde moderne et son radicalisme outrancier firent de lui la référence des «Afghans arabes». C'est ainsi que son action et son influence furent introduites en Algérie. Dès que les islamistes algériens affiliés, peu ou prou, à l'ex-FIS, prennent le maquis en 1992 et appellent au djihad, Abou Qotada est, de fait, consulté et vite adopté, mieux, plébiscité comme le véritable référent doctrinal, le mufti légal des groupes armés. A partir de 1992, il est celui qui a légitimé toutes les exactions, tous les crimes du GIA. Ses fetwas étaient propagées aux quatre coins du pays et donnaient de la consistance, du «sérieux» aux crimes les plus invraisemblables. A partir de Londres (il quitte le Pakistan en 1995 pour la Grande-Bretagne), où il a obtenu l'asile politique, il soutient le GIA, par le biais de ses prêches des vendredis, à Baker Street, et par l'intermédiaire du bulletin du GIA El-Ansar, publication subversive qui relatait, traitait, commentait et justifiait le djihad en Algérie et toutes les actions terroristes menées pour infléchir le régime. A partir de 1996, Abou Qotada, qui contrôlait totalement les activités du GIA, commence à grincer des dents. Certaines actions de ce groupe sonnaient totalement faux, tel l'assassinat des sept moines trappistes de Tibhirine et des deux ex-membres de la direction du FIS, Mohamed Saïd et Abderrezak Redjam. La prise de la direction du GIA par Antar Zouabri à partir de 1996 n'était pas pour arranger les choses. Celui-ci, de par ses actions injustifiables contre les populations civiles, les assassinats collectifs... rendaient les fetwas de Abou Qotada «invraisemblables». Ce dernier rompt toute aide matérielle au GIA et suspend El-Ansar. Il encourage le séparatiste du GIA, Abdelmadjid Dichou à créer une nouvelle organisation salafiste. Ce sera le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), né officiellement en 1998. A partir de 1999, Abou Qotada n'agit plus directement, en Algérie, mais aide ses protégés, les groupes armés, par des contacts avec les médias arabes implantés à Londres. Il est aussi connu pour avoir essayé divers «plans de rapprochement» entre le Gspc et les groupes séparatistes du GIA, El-Ahoual, Houmat Ed-Daâwa Es-Salafiyya et les autres groupes plus ou moins connus de l'Ouest algérien.