Le gouvernement avait repris cette proposition de loi émanant de la droite à son propre compte, en janvier dernier, pour riposter aux premières manifestations des «Gilets jaunes», ces Français protestant contre la politique sociale et fiscale du président Macron. Le Parlement français a adopté mardi soir une loi anticasseurs consécutive aux violences ayant émaillé les manifestations des «Gilets jaunes», mais ses aspects les plus controversés pourraient être annulés par la justice. Le président français Emmanuel Macron a saisi, quelques jours avant l'adoption du texte, le Conseil constitutionnel, la plus haute instance judiciaire française, chargé de valider la constitutionnalité des lois. Avec la nomination de l'ancien maire de Bordeaux et candidat malheureux à la primaire de la droite lors de la présidentielle, Alain Juppé, le président Macron s'est donné les garanties nécessaires pour obtenir l'adoption sans coup férir de cette loi. C'est pourquoi, affirme le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, la saisine «permettra de lever les doutes, elle permettra de lever tous les soupçons», tout en défendant le texte comme une «loi de protections». Interdictions préventives de manifester -- mesure qui a cristallisé les critiques -, fouilles, délit de dissimulation du visage: le texte adopté par la majorité de droite au Sénat, après les députés en février, a été dénoncé comme «liberticide» à gauche et critiqué par certains élus de la majorité présidentielle. «Ce texte ne comporte pas le début d'une once d'arbitraire», a assuré Christophe Castaner, soulignant que «la justice reste l'ultime garant des libertés». La proposition de loi visait initialement les «black blocs», des activistes anarchistes habillés de noir qui prônent et mènent des actions violentes lors de manifestations, et avait été approuvée une première fois par le Sénat en octobre. Le gouvernement l'avait reprise à son compte en janvier, après les premières manifestations de «Gilets jaunes», ces Français protestant contre la politique sociale et fiscale du gouvernement. Ces rassemblements, qui se déroulent tous les samedis depuis le 17 novembre, ont été la plupart du temps émaillés de violences entre manifestants et forces de l'ordre. Début décembre notamment, les images de chaos dans Paris et sur la célèbre avenue des Champs Elysées avaient fait le tour du monde.» Ce texte ne vise pas les 'Gilets jaunes''', il vise au contraire les cagoules noires», a souligné le sénateur de droite Bruno Retailleau, rappelant que pour lui «le coeur du texte est le délit de dissimulation du visage». «Il met en péril la liberté de manifester», a dénoncé pour sa part la présidente du groupe CRCE (communiste) Eliane Assassi, tandis que l'écologiste Esther Benbassa reprochait à la droite sénatoriale et à la majorité présidentielle, «main dans la main», de faire «fi des grandes institutions internationales qui ont récemment dénoncé l'escalade des violences anti-manifestants dans notre pays». Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, chiraquien de longue date, a lui aussi émis ses réserves sur la nouvelle loi, estimant «clair que cette disposition sur l'interdiction de manifester peut paraître contradictoire avec nos principes constitutionnels».