Le plan d'action prend forme mais beaucoup de points de divergence restent en suspens. Il a fallu quelque deux heures de temps aux ministres de la Défense de l'Initiative du groupe «5+5» pour adopter le règlement intérieur du comité directeur, faire le bilan des activités de 2005 et approuver le projet du plan d'action pour l'année 2006. La «photo de famille» prise à midi mettait côte à côte Abdelmalek Guenaïzia, ministre algérien délégué auprès du ministre de la Défense, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre français de la Défense, ainsi que les ministres et représentants de la Libye, la Tunisie, le Maroc, la Mauritanie, le Portugal, Malte, l'Espagne et l'Italie. Cette réunion d'Alger, la deuxième du genre, après celle de Paris de décembre 2004, devait prendre soin d'éviter les questions pointues et les points de divergence, et au contraire, axer le plan d'action sur des mesures qui feraient consensus. Très optimiste, Abdelmalek Guenaïzia, qui assurait la présidence de la réunion, a estimé que l'Initiative «5+5» est un «indice probant de la réussite» de ce processus. Il a jugé aussi que ce dialogue «5+5» est le «témoignage clair de l'engagement de tous à oeuvrer en parfaite synergie, dans un cadre concerté touchant des domaines aussi sensibles que la sécurité et la stabilité de la région». Les travaux qui se sont déroulés à huis clos, entre 10 heures et midi, ont mis en face cinq pays de l'Europe (la France, l'Italie, l'Espagne, Malte et le Portugal) et cinq du Maghreb (l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, la Mauritanie et la Libye) tendent à aller vite vers une coopération sérieuse en matière de sécurité, de lutte contre le terrorisme et d'immigration clandestine. Pour être réellement influents et pratiques, les «5+5» vont tripler les actions et les initiatives pour l'année 2006 dont la présidence va échoir à la France. Très entourée par la presse, le ministre français de la Défense, Mme Michèle Alliot-Marie a affirmé être réjouie par les propositions faites au cours de la séance de travail: «En 2006, nous allons tripler nos actions et cela nous permettra, en particulier, de mutualiser nos savoir-faire.» Alliot-Marie a notamment annoncé que la France a proposé «la création d'une école commune» où les «officiers pourraient apprendre à se connaître et à étudier ensemble les problèmes, et, donc, ensuite, à travailler sur l'avenir (...) nous partageons des dangers communs, nous devons y réagir en commun, et c'est pour cette raison que nous travaillons sur la surveillance maritime, aérienne et sur les réactions aux catastrophes naturelles.» En définitive, la réunion d'Alger a surtout servi à prévenir et à travailler sur l'année 2006. Les «5+5» ont adopté un plan d'action constitué d'une douzaine d'activités axées sur les volets de la surveillance maritime et aérienne, la lutte antiacridienne et les mines antipersonnel. La «photo de famille» des dix pays, prise peu avant midi mettait côte à côte des intérêts divergents, des soucis particuliers et des priorités qui ne sont pas partagées par tous. Si les pays du Sud essayent de faire un surplus d'efforts pour s'amarrer au développement et à la stabilité politique et sociale, le souci des Européens reste de contenir le flux migratoire et la menace terroriste (qui ne peut venir que du Sud). Les «turbulences migratoires» en France, les répressions contre l'immigration clandestine en Espagne et en Italie démontrent que le souci majeur des pays de l'Europe est, et reste, celui d'endiguer le «fléau migratoire», source de tous les maux. Le Maroc et l'Algérie repoussent par exemple, annuellement, quelque 18.000 candidats clandestins vers l'Europe, mais ne peuvent longtemps payer le prix et l'effort humain et financier de ce travail. En 2004, l'Algérie, par la voix de Abdelaziz Belkhadem, avait rejeté une demande européenne qui proposait de créer des «zones de parquage» dans les pays du Maghreb pour migrants clandestins. Pour le moment, le peu d'aide - dérisoire, selon les pays maghrébins - que l'Europe propose est celui de la lutte antiacridienne, et, pour l'Algérie, de la lutte contre les mines antipersonnel. Maigre consolation...