Les combats se poursuivent aux portes de Tripoli Sur le terrain, hier, les forces loyales du GNA ont lancé une contre-attaque contre l'ANL du maréchal Khalifa Haftar, au sud de la capitale libyenne. L'annonce tardive d'un contact direct entre Donald Trump et le maréchal Khalifa Haftar, en pleine offensive sur Tripoli, est venue hier clarifier un jeu international malsain qui voit Moscou et Washington embarqués dans la même galère, avec des intérêts diamétralement opposés, et le risque évident de disqualifier, pour longtemps, l'ONU en Libye. C'est le jour même où la diplomatie britannique tentait de faire adopter un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'(ONU, réclamant un cessez-le-feu immédiat, tout en critiquant l'attaque contre Tripoli, que le président Donald Trump s'entretenait au téléphone avec le maréchal Haftar sur «une vision commune» de l'avenir «démocratique» de la Libye. La révélation est venue de la Maison-Blanche. Le maréchal Khalifa Haftar dont les ambitions sont connues de longue date apparaît, désormais, comme le Bolsonaro du Maghreb, avec tout ce que cela implique comme conséquences prévisibles. En prenant fait et cause pour l'homme de guerre libyen sous prétexte qu'il joue un «rôle significatif dans la lutte contre le terrorisme et la sécurisation des ressources pétrolières de Libye», dixit le communiqué de la présidence américaine, Washington sacrifie ouvertement le GNA et Fayez al Serraj, reconnus, depuis décembre 2015, comme la seule autorité légitime par la communauté internationale. Ceci explique cela, et la détermination de Haftar d'aller jusqu'au bout de son offensive revêt davantage de clarté, même si l'ANL autoproclamée est enlisée, après 15 jours de combats et des bombardements aveugles visant les quartiers résidentiels de la capitale libyenne. Comme aussi on comprend mieux l'échec du Royaume-Uni, soutenu par l'Allemagne et la France, à obtenir une résolution contraignante sur un cessez-le-feu et un accès humanitaire inconditionnel aux zones de combat. Si Washington a des raisons claires de parier sur le maréchal Haftar, à commencer par le soutien des pays comme l'Arabie saoudite, les Emirats et l'Egypte, les motivations russes sont plus aléatoires, dans la mesure où l'homme est connu tant par sa versatilité que par son allégeance au pays qui lui a assuré un asile pendant plus d'une décennie, dès qu'il fut relâché par les autorités tchadiennes après sa mésaventure du Ténéré. En misant sur Haftar, la Russie a-t-elle bien calculé son coup, pour autant? La question mérite d'être posée. Quant au vote des trois pays africains, membres non permanents du Conseil de sécurité, l'Afrique du Sud, la Côte d'Ivoire et la Guinée équatoriale, il semble que les pressions égyptiennes aient joué puisque Le Caire parraine Haftar et, depuis peu, la présidence de l'Union africaine. L'ONU et d'autres pays attachés à la légalité internationale ont subi un véritable camouflet avec cet encouragement explicite aux appétits bellicistes du maréchal Khalifa Haftar. Quelle que soit la frustration du Royaume-Uni et de l'Allemagne, notamment, le plus affligé en l'occurrence reste le secrétaire général de l'ONU qui effectuait sa première visite en Libye afin de soutenir la feuille de route onusienne et la conférence de réconciliation nationale programmée à Ghadamès, puis annulée in extremis par un Ghassan Salamé effondré. Sur le terrain, hier, les forces loyales du GNA ont lancé une contre-attaque contre l'ANL du maréchal Khalifa Haftar, au sud de Tripoli. «Nous avons commencé l'attaque. Des ordres ont été donnés pour avancer et gagner du terrain», a déclaré Moustafa al-Mejii. Des tirs nourris de roquettes et d'obus ont été entendus depuis plusieurs quartiers de la capitale, après quelques jours de combats de faible intensité «Après coordination, nos forces ont commencé de vastes opérations», notamment sur les fronts de Wadi Rabie, al-Sawani et Ain Zara, a précisé Rida Issa, autre porte-parole. Le colonel Mohamad Gnounou, porte-parole des forces du GNA, n'a pas livré de détails, indiquant juste qu'un «compte-rendu sera donné en fin de journée» et que sept frappes aériennes contre les positions de l'ANL au sud de Gharian et la base aérienne d'al-Wotya ont eu lieu. L'ANL affirme de son côté «avoir pris le contrôle de plusieurs nouvelles positions sur les fronts des combats», une progression supposée induire une «retraite sur tous les fronts» des forces adverses. Tout en prétendant avoir reçu d' «importants renforts», l'ANL piétine dans son offensive «éclair» qui date, déjà, de plus de deux semaines et a fait 213 morts ainsi que plus de 1.000 blessés, selon l'OMS.