L'objectif de tous ces échanges est de multiplier les visions, de varier les genres, de créer un mouvement théâtral. Le Théâtre national d'Alger Mahieddine- Bachtarzi est un lieu de culture, et à ce titre il se doit de rayonner en accueillant dans ses structures aussi bien les troupes indépendantes, les auteurs que les théâtres régionaux en tournée. C'est donc vraiment une plaque tournante au sens noble du terme. Le premier public qui bénéficie de ces égards tout particuliers est bien entendu celui des enfants, à l'adresse desquels des visites guidées sont organisées. On les mène dans les coulisses, on leur fait connaître l'éclairage, les costumes, les loges, et tous les autres accessoires et structures du théâtre. En parallèle, l'équipe dirigeante du TNA a aussi créé une nouvelle plage, intitulée «Echo des plumes», qui est un espace ouvert aux jeunes auteurs (écrivains, conteurs, poètes) qui sont invités à faire une lecture publique de leurs oeuvres. Mais des auteurs plus connus peuvent aussi s'adresser au public, comme Bouziane Benachour ou M'hamed Benguettaf lui-même, ou des poétesses comme Mmes Djalti ou Negrouche. Ces séances ont lieu un dimanche sur deux, soit deux fois par mois. L'expérience ne s'arrête pas là, des comédiens du TNA, faisant partie de la nouvelle vague, donnent corps au texte, dans la salle Hadj-Omar. En offrant au texte la chance d'être mis en lecture scénique, on peut dire que la boucle est bouclée. Ce faisant, ce qui est recherché, c'est une exploitation rationnelle des espaces existants. S'il y a un regret qu'exprime M.Benguettaf, c'est bien celui qui concerne la faiblesse des échanges entre les théâtres publics: «Ça doit se faire. On doit commencer par là. Il faut que le théâtre du secteur public procède à l'élaboration d'un plan de travail pour aboutir à un partenariat plus poussé.» Avec le Théâtre régional de Constantine existe une convention, pour une prise en charge réciproque lors des déplacements. «Mais les théâtres régionaux ont-ils les moyens de prendre en charge 15 ou 20 personnes? Ce n'est pas facile.» Et la question reste posée. «Peut-être qu'on devrait aller vers des coproductions, en mettant sur rails quelque chose. A charge pour nous de nous concerter. Il faut tisser des liens, asseoir une autre vision, une autre approche.» M.Benguettaf en est sûr. Il est possible de faire des choses à l'échelle nationale, par exemple de faire venir un metteur en scène de Annaba, échanger des textes, des techniciens, créer une ambiance, une synergie. Cette coopération ou ce partenariat pourrait également toucher les troupes indépendantes. «La survie du théâtre passe par la multiplication des troupes indépendantes, ou semi-professionnelles.» Malheureusement, on les compte sur les doigts de la main. «On n'a qu'à voir le festival du théâtre amateur.» L'objectif de tous ces échanges est de multiplier les visions, de varier les genres, de créer un mouvement théâtral. Le TNA est-il en mesure d'organiser un festival, avons-nous demandé. «Oui, bien sûr», assure M.Benguettaf. D'ailleurs, ce festival vient d'être institutionnalisé. Avec des salles comme celle du Mougar et d'Ibn Khaldoun, la manifestation est facile à mettre en place et à gérer. Cela dit, il faut disposer d'environ une dizaine de salles pour rayonner sur les environs d'Alger, comme Boumerdès, Blida, Tipaza, d'autant plus que certaines salles de cinéma ont une scène qui peut être aménagée pour accueillir environ 250 personnes. En d'autres termes, il est inconcevable qu'un lieu de culture comme le TNA soit fermé sur lui-même, sans s'ouvrir aux autres, à tous ces poètes, à tous ces artistes accomplis ou qui s'ignorent, à ces troupes à la recherche d'un espace où répéter, à ces comédiens en quête d'auteurs, à ces textes en manque de scène.