Le vieux bâti en Algérie constitue une bombe à retardement qui met en danger des milliers de vies humaines. La question du vieux bâti, relancée à la suite de la catastrophe survenue, mercredi, en plein coeur d'Alger, est une menace à haut risque. Il faudrait qu'un drame survienne pour permettre aux Algériens d'en tirer les leçons. Et le malheur de mardi dernier, qui a frappé brutalement huit familles, témoigne de notre déficience dans la connaissance approfondie de nos villes. Il ne fait aucun doute, à travers les drames qui se succèdent, à commencer par le séisme de Boumerdès, pour arriver à l'effondrement de l'hôtel El Hadika à Alger-centre, que c'est toute l'approche de la ville qui mérite d'être revue, particulièrement dans les métropoles. La question qui porte sur la durabilité de l'armature urbaine ne cesse d'être posée sans qu'aucun plan de prévention à long terme ne soit suggéré jusqu'ici. Pourtant, cette solution inévitable s'impose avec acuité. Faut-il jeter la balle dans le camp de la population ou dans celui des pouvoirs publics? La responsabilité est visiblement partagée. En décortiquant l'affaire du vieux bâti et du tissu urbain de nos villes, l'on relève un dysfonctionnement perçu comme étant des plus sensibles et qui persiste depuis des décennies; absence d'un plan de prévention contre les risques majeurs, affaiblissement des bâtisses par des pratiques illicites, non-respect de la loi concernant la construction..., annonçaient, de fait, quelques pistes de recherche fertiles telles que la dégradation de l'environnement, le peu d'écoute accordé par les autorités locales aux doléances des habitants... etc. D'autres questions méritent d'être posées dans ce sillage. Il s'agit notamment, des modes de fonctionnement et de gestion des villes, de la politique d'extension, de l'accession au marché foncier et immobilier, de percevoir les stratégies des acteurs publics et privés dans la formation du bâti urbain, et de déceler les dysfonctionnements. Pourtant, au plus haut niveau, ces mêmes questions ne cessent d'être au centre des discussions. Rappelons que le Président de la République a souligné, lors du conseil des ministres du 9 février de l'année en cours, que «s'il est important de veiller à la préservation du patrimoine culturel et des inestimables richesses historiques que recèlent de nombreuses villes du pays, un égal intérêt doit être accordé à la restructuration et à la modernisation du tissu urbain actuel, pour le rendre plus fonctionnel...». A la lumière de ces orientations et compte tenu de l'urgence à mettre en place un cadre efficace de gestion des villes, le chef de l'Etat a instruit le gouvernement à l'effet d'approfondir la réflexion sur cet important dossier et de le soumettre, à nouveau, à l'examen du conseil des ministres, selon les procédures institutionnelles établies. Le désastre de mercredi montre ainsi l'arbre qui cache la forêt. D'autres immeubles menacent de connaître le même sort à travers bon nombre d'autres quartiers. Du côté du groupement Ctc (contrôle technique de construction), M.Hamid Azouz, son président, indique que toutes les bâtisses classées orange 3 et orange 4 au lendemain du séisme de 23 mai 2003, ont été consolidées et réhabilitées. Par ailleurs, s‘expliquant sur la question du vieux bâti, M.Azouz recommande de mettre en place un réel programme de prévention à long terme. Les prévisions d'une secousse tellurique au niveau du grand Algérois, fondées sur le fait qu'Alger est entourée de quatre failles géologiques, incitent sérieusement à prendre la question au sérieux et accélérer la cadence pour le renforcement du vieux bâti. Faut-il assister encore à d'autres drames pour faire bouger les choses? Il ne s'agit pas uniquement d'intervenir auprès des immeubles et des hôtels d'Alger, d'Oran, d'Annaba ou de Constantine, mais le problème est national. Des instructions, à la suite de cet incident, ont été données pour mener «immédiatement» une enquête sur l'origine du drame. Vétusté ou non-respect des normes ? Qu'importe, l'urgence impose de réagir rapidement pour sauver d'autres vies.