Un des moments forts du festival, ce sont ces ateliers d'initiation cinématographique destinés aussi bien aux adultes qu'aux enfants... Ils sont cinq groupes dispatchés en trois niveaux d'ateliers différents. Le premier s'attache à «l'idée du film au premier «moteur», le second correspond au «tournage, enregistrement de l'image et du son» et le troisième consiste à faire le montage de l'image et du son, via les moyens techniques et technologiques. En ce deuxième jour du festival du film amazigh de Ghardaïa, les activités se poursuivent cahin-caha. Au centre culturel de Beni Izguen où se tiennent ces ateliers de formation, le travail s'aligne du matin jusqu'en fin d'après-midi. Les stagiaires rencontrés sur les lieux semblent tous satisfaits par le travail de groupe entrepris et espèrent en sortir avec de nouvelles connaissances et un savoir-faire certain. Dans cette maison de deux étages, se trouve ainsi derrière chaque porte un projet assez original. Ici, l'idée est de faire le portrait du réalisateur Amer Alwan de Zaman, l'homme des roseaux après avoir visionné son film et l'avoir interrogé, ici l'idée est de réaliser chacun un sujet sur la ville de Ghardaïa ou sur un festivalier... Assis derrière leurs pupitres, l'échange se nourrit des propositions de ces élèves-stagiaires avec leur professeur qui leur apprend ce qu'est un diaphragme dans une caméra, d'autres comment choisir la trame d'un film. Mohamed Kunda est un artiste multiple, en plus d'être artiste plasticien, sculpteur, musicien, il est aussi réalisateur. Lui, il s'occupe de l'atelier réalisation de documentaires. Avec ses dizaines de stagiaires qu'il encadre, Mohamed Kunda dit aimer accompagner les gens dans leurs projets. Son coup de coeur c'est l'homme. Cet aventurier, qui se plaît à apporter et peaufiner les connaissances de ses stagiaires, a cette jolie expression qui résumerait un peu sa vie, son métier, sa passion: «Un film c'est un voyage». Au départ, il y a son film-documentaire réalisé il y a quelques années et présenté en Algérie, Shantz, l'enfant jazz, qui sera diffusé sur les chaînes d'une dizaine de pays et présenté dans de nombreux festivals, notamment à la dernière édition du festival du film de Timimoun de Mohamed Chouikh. «Ce film a une particularité. J'ai rencontré les protagonistes de cette histoire, la maman et son fils qui rêvait d'être trompettiste, la veille du tournage. J'ai filmé directement et je suis resté avec eux pendant plusieurs années. J'ai filmé «Un destin en marche». Ce que je voudrais partager avec ces jeunes c'est un peu par rapport à cette démarche-là, c'est comment arriver à la fois à un film et raconter une histoire. Ce qui m'intéresse de dire c'est que c'est possible. On est en Algérie où il y a peu de moyens techniques. J'essaye de leur démontrer que le cinéma ce n'est pas quelque chose d'inaccessible, quel que soit le type de matériel, on peut monter une histoire s'il y a quelque chose à dire. J'essaye de leur démontrer comment raconter une histoire en fonction des moyens qu'on a. Nous avons un matériel modeste. Nous allons essayer avec les outils qu'on a de créer le meilleur film que soit avec le temps qui nous est imparti, sans esprit pédagogique mais de façon simplifiée pour que, ensemble, on comprenne que c'est possible.» Abdelkader Amssad, un jeune de 33 ans, documentariste, nous parle de son expérience dans cet atelier: «Ce qui m'intéresse est le travail de groupe qui est important, le regard extérieur aussi. Mon but est d'arriver à réaliser une fiction ou un documentaire qui soit à la hauteur». Un autre jeune stagiaire, Mokrane Mariche, 22 ans, nous confie pour sa part: «Mon stage de réalisation avec Mohamed Kunda est très intéressant parce que le contact avec les professionnels est toujours enrichissant et en groupe aussi car cela permet de confronter ses idées et même des univers assez différents. Chaque personne a une manière de raconter les histoires, elle a ses propres références cinématographiques. Cela permet de remettre en cause les choses qu'on aime, avec un groupe cela créé un rapport dialectique avec cette rencontre qui va déboucher sur la réalisation d'un court métrage de fiction. Et comme dirait Mohamed Kunda, faire un film c'est comme faire un couscous. Il faut un tas d'ingrédients. Il faut des dosages, une ossature, une trame que nous sommes en train de peaufiner». A côté, loin de là, se tient un atelier spécial enfants qui contribue à leur éducation à l'image. Ici, beaucoup de garçons en tenue du M'zab et point de filles. Il faut dire qu'à Ghardaïa, les us et coutumes sont rudes pour les filles. Les femmes ne vont pas au cinéma. C'est interdit, haram! Point de mélange garçon et fille dans un seul espace. Aussi, le travail consiste à changer les mentalités pour sortir de ce conservatisme ambiant. Sébastien Duclochet s'occupe de cet atelier pour enfants, accompagné qu'il est par un jeune traducteur d'ici, de Nadira et un autre animateur. Sébastien est coordinateur du pôle éducation à l'image en Auvergne. Son activité développée par le ministère de la Culture, dépend du festival du court métrage de Clermont-Ferrand. «On fait des choses simples pour montrer aux enfants qu'on peut travailler sur l'image et comprendre les étapes de développement de l'histoire dans la cohésion avec eux. On projette des films d'animation en 3D et des dessins animés. Le cinéma c'est de la tricherie finalement. On leur explique que ce sont des images qu'on peut faire avec du papier que l'on va montrer au ralenti», nous a expliqué Sébastien. En effet, dans une ambiance bon enfant, l'atmosphère était à la détente didactique et à l'enseignement de choses simples. Un bel atelier qui résonnait d'innocence et d'apprentissage utile pour les enfants, les adultes futurs créateurs de demain.