Abdelkader bensalah Le président de l'Etat a pris le soin de ne pas fixer de date pour la présidentielle. Le président de l'Etat s'est adressé, jeudi dernier, à la nation. Même s'il a habitué les Algériens à raréfier ses sorties publiques, son discours était attendu, en rapport, notamment à la nouvelle mission que lui a confiée le Conseil constitutionnel. Appelé à organiser la présidentielle et ne mettre fin à son intérim qu'à l'issue du scrutin, Bensalah n'est certainement pas sourd à l'une des principales revendications de la rue et qui n'est autre que son départ. Mais l'homme qui, en fonctionnaire très discipliné, a pris acte de la prorogation de son mandat, a aussi pris la précaution, dans son discours, de n'en tirer aucune gloriole. Sachant parfaitement la difficulté de ce qu'il est attendu de lui dans les circonstances actuelles, il s'est visiblement résolu à ne pas mettre la charrue avant les boeufs. Ainsi, même si l'impératif d'une élection présidentielle, dans les plus brefs délais, est acté par le chef de l'Etat, il se refuse d'en annoncer la date, sans préalable. Une erreur déjà commise dans la dernière tentative avortée d'organiser le scrutin pour le 4 juillet. Tirant les leçons du deuxième échec de la présidentielle, le chef de l'Etat a préconisé l'option «du dialogue inclusif en vue de poser les jalons du processus de concertation». Dans son discours qui a duré une dizaine de minutes, Abdelkader Bensalah a donc invité «la classe politique, la société civile et les personnalités patriotique nationales, jalouses du devenir de l'Algérie (..) à débattre de toutes les préoccupations portant sur la prochaine échéance présidentielle». L'ordre du jour n'est pas resserré et l'objectif consiste à «tracer une feuille de route devant aider à l'organisation du scrutin dans un climat d'entente et de sérénité». Il convient de souligner que cette proposition avait été faite par le même Abdelkader Bensalah à deux reprises au moins. Une première fois, au lendemain de sa nomination à la tête de l'Etat, en application de l'article 120, et une deuxième fois au moment où il devenait quasi impossible d'organiser la présidentielle du 4 juillet. Les deux appels, qui étaient formulés dans les mêmes termes, n'avaient débouché sur rien. La raison évidente, à l'époque, tenait de la fixation de la date de la présidentielle de manière «automatique». Pour l'appel d'avant-hier, le président de l'Etat a pris le soin de ne pas fixer de date et laisser cette décision à une conférence nationale inclusive qu'il appelle de ses voeux. Relevant le caractère strictement «technique» de sa mission à la tête de l'Etat, Bensalah s'est engagé à garantir «au scrutin présidentiel toutes les conditions d'une élection régulière, libre et transparente, telle que souhaitée par notre peuple». Un engagement qui ne répond pas à la question de son organisation, mais place l'opportunité du dialogue «pour restaurer la confiance et mobiliser les forces patriotiques nationales en vue de construire le consensus le plus large possible autour de l'ensemble des questions en rapport avec les aspects législatif, réglementaire et organisationnel de cette élection, et sur les mécanismes de son contrôle et sa supervision». C'est-à-dire que le président laissera la main à la Conférence nationale de décider de tous les détails en rapport avec l'organisation du scrutin. Le voeu de Bensalah est donc de créer les conditions d'une élection pour permettre au pays de retrouver une institution présidentielle légitimée par le suffrage universel. Il reviendra, ensuite, au «président de la République, élu démocratiquement, (de) lancer (les) réformes et contribuer à relever les défis qui se posent à notre Nation». L'option d'un retour rapide à la légalité constitutionnelle étant partagée par l'écrasante majorité des acteurs politiques et de la société civile, il convient, soutient le président de l'Etat, d'insister auprès de «toutes les bonnes volontés, celles dont le leitmotiv est l'amour de la patrie et l'abnégation à son service, celles qui ont foi en l'élan collectif et en la maturité de notre peuple et bannissent toutes formes d'exclusion et d'aventurisme, particulièrement lorsqu'il est question de l'avenir de l'Algérie», d'opter pour un dialogue inclusif aux fins de parvenir à une feuille de route consensuelle qui garantisse, une élection transparente et démocratique. Toute la question est de savoir quand, comment, par quel mécanisme le dialogue souhaité sera enclenché. Bensalah n'en a pas donné les clés, à moins que la rencontre du 15 juin prochain, organisée par la société civile, apporte les réponses aux questionnements des observateurs.