L'auteur, ici, nous apprend à voir les choses autrement. Dès lors, le miracle peut arriver... L'écrivain Djamel Mati vient de publier récemment le 2e volet des Elucubrations d'un esprit tourmenté. Il s'agit de Aigre-doux, sorti aux éditions Apic. Après Les aventures de Fada, Djamel Mati est revenu pour nous conter à nouveau les fabuleuses aventures de l'être humain entre réel et fantastique, paradis et enfer. Depuis Sibir Kafi.com, le point B114 ne cesse de se déplacer. Après avoir été fixée dans une cabane, ici, l'adresse recouvre une autre dimension. En se réveillant dans une venelle à la Casbah, à la rue Du Diable, «il» s'aperçoit que cette rue a été rebaptisée B114... L'écrivain Djamel Mati n'arrête pas de délirer. Et c'est tant mieux pour ses lecteurs ou simples amateurs d'évasion et d'air libre, parce que nous ne cessons en effet de voyager à travers ses romans. Après Sibir Kafi.com, la quête de soi d'un ailleurs, où tout s'arrache au prix de sacrifices et de tourments, continue. C'est de nouveau l'aventure qui recommence. Hors du temps et de l'espace, dans des pérégrinations à la recherche de ce point nodal, le point B114, au niveau duquel toute chose change d'état : la vérité est mensonge, la réalité est rêve, le rêve est un cauchemar, la rue est absurde, l'enfer est un paradis. Tout dépend du côté duquel on se place. Un pont énigmatique, à partir duquel reposent les inquiétudes de ce personnage principal du roman Aigre-doux. S'il est le numéro de la maison où il habite, il est tout aussi placé à travers villes, monts, dunes et vallées, en aval des murs en amont des déserts... partout. Peut-être même qu'en partant, lui, il ne nous quitte jamais finalement, comme une sorte de virus qui nous colle à la peau ou, peut-être, une seconde nature. A nous de le changer, de le débusquer ou bien de le subir... de faire en sorte que les choses changent, de modifier le courant de notre vie pour basculer de l'acerbe à l'exquis... C'est sans doute cela le propos du nouveau roman de Djamel Mati, énième épisode des Elucubrations d'un esprit tourmenté. Ici, l'auteur se plaît à guider nos pas, tel un alchimiste né d'une plume d'un Paolo Coehlo. Si l'histoire paraît abracadabrante et les évènements surréalistes, l'issue, elle, est surprenante et nourrit la réflexion, comme l'imaginaire. Tout est paraboles et sous-entendus. Le personnage de ce livre se réveille dans un monde sans télé ni parabole, les légumes subissent, eux un aussi mauvais traitement que les humains et les robinets rebelles font la grève. Pour se réconforter de ce monde hostile, le personnage avale constamment des pilules aigre-douces pour dormir, à tel point qu'il ne sait plus distinguer, après, entre le rêve et la réalité. « Des évènements qui se passent dehors et dans mon cerveau ont un goût de déjà vu », pense-t-il. La nourriture et l'argent se font rares. Le voyageur prend l'apparence du diable, rencontre un Minotaure bipède, ses pilules hallucinogènes continuent leurs dommages. Les libraires et les bibliothèques sont transformées en fast-food et fumeries, les hommes sont clonés. L'auteur, à travers une écriture belle, philosophique et limpide, pond des phrases qui poussent inéluctablement à la méditation, comme ces formidables pages 64 et 65 sur les amants et l'hypocrisie. Commence alors la longue marche sur la route des sans-coeur. Un peu avant, note-t-on: «Le chemin est en toi, va, suis ton chemin, il finira par te mener là où tu dois aller ...». Dans sa traversée du désert, il pénètre un espace où le temps s'est figé mais où sa grandeur ouvre l'esprit à tant d'enseignements. Les métaphores pleurent. La référence au roman de «l'alchimiste» est ici présente, prenante. «J'ai l'impression que tout l'univers conspire contre moi». Le voyageur, au fur et à mesure qu'il avance, s'interroge, car il ne se sait pas qui est-il, ni d'où il vient. Et puis la réponse tombe: «Tu dois transformer en ce qu'il y a de meilleur en toi» (...). «L'aigre et le doux sont les saveurs de la vie». Est-ce là le secret que charrie la morale de ce livre? Et pourquoi se transforme-t-on à la fin du roman en une femme? Une symbolique qui, de notre point de vue, sort du contexte. Encore une fois, l'auteur, Djamel Mati, a su nous porter sur son nuage de poésie où tout n'est que amour et rêverie. Tout se doit de changer ainsi, même nous! A nous de faire de notre existence un enfer ou un paradis.