Point de départ est le nom de cette expo ouverte jusqu'au 22 février. La galerie Esma à Riadh El Feth accueille, depuis hier et ce jusqu'au 22 février, une belle exposition d'arts plastiques de l'artiste Zineb Sedira, intitulée Point de départ. Celle-ci s'articule en deux temps : deux expositions de photos, l'une intitulée La maison de ma mère et l'autre La terre de mon père. Ces dernières traduisent en images le rapport de cette femme avec ses origines qu'elle questionne afin de rétablir un dialogue avec son passé. Il faut noter que Zineb Sedira est née en France, d'origine algérienne, plus précisément de Bordj Bou Arréridj. Elle vit actuellement avec son mari et ses enfants en Angleterre où elle travaille. A travers ces douze photos de 30 sur 30 accrochées aux cimaises de la galerie, l'artiste évoque, en rendant hommage à ses parents, à la fois la douceur et la force tranquille de cette mère qu'elle révèle sous ce pan d'affectivité et que l'on discerne par ces images où l'on peut apercevoir des coussins, des rideaux brodés, un lit au drap chiffonné. Tout ce qui peut traduire la chaleur d'un foyer. Le père, lui, est représenté dans ses terres, affairé. Le polyptyque La maison de ma mère, qui date de 2002, date à laquelle Zineb commença à retourner chez elle, montre, nous indique-t-on de façon kaléidoscopique, «un univers féminin, feutré et autobiographique. Les détails sont choisis comme des éléments ponctués de blancheur et de fraîcheur. Ils décrivent, avec pudeur et retenue, l'environnement quotidien de la mère de l'artiste». Depuis son retour en Algérie, le travail de Zineb Sedira engage des réflexions plus précises sur le nomadisme, le retour et le voyage. C'est pourquoi, on sent beaucoup d'émotion qui transparaît. Elle nous confie: «En tant qu'enfant d'immigré, on a toujours cette question par rapport à l'authenticité. Parfois, on a l'impression de ne pas être accepté. C'est un traumatisme qui est resté. Petites, on nous jetait des cailloux en nous sommant de revenir en France. Je sais qu'il y a des membres de ma famille qui ne veulent plus revenir à cause de cela, car ils se sentent rejetés.» Dans La terre de mon père, réalisée en 2003, l'artiste utilise des images représentant des paysages de la région de Bordj, terre de ses ancêtres et où elle a grandi... Dans Point de départ, qui chapeaute en quelque sorte toute l'exposition, Zineb Sedira a immortalisé son départ de Marseille en bateau vers Alger. Traversée que ses parents ont pratiquée quand ils ont émigré en France. Pourquoi ce titre? L'artiste confie: «Grâce au CCF, c'était pour moi l'occasion de venir en Algérie, d'y exposer pour la première fois en me sentant acceptée en tant qu'artiste ici, pour la première fois aussi, en espérant pousser ce voyage avec d'autres projets...» Dans Traces d'un passé récent et présent (2003), Zineb Sedira explore les thèmes de la mémoire de façon différente. Après la mémoire familiale qui transmet le patrimoine et l'héritage familial, ici c'est la mémoire historique qui est revisitée. Les photographies ont été prises à Alger, lors d'un séjour consacré aux recherches sur les vestiges d'habitations romaines et de leurs mosaïques, patrimoine antique légué par une civilisation «coloniale» lointaine. Ces vestiges, résidus, céramiques, traces de maisons, de murs, de façades ou terrasses, laissent imaginer une vie domestique et familiale. Toutes ces traces, celles de la civilisation romaine comme celles du patrimoine français, laissent après elles des témoignages comme autant de preuves de la richesse que de la douleur de leur passage. Enfin, dans Langue maternelle, Zineb Sedira utilise la vidéo pour témoigner du passage de la tradition algérienne vers une autre culture, et la possibilité d'y dresser un dialogue, notamment entre la grand-mère ne parlant que l'arabe et la fille de Zineb, celle-ci parlant l'anglais. Les images témoignent de la complexité de ce rapport qui raconte l'autobiographie de l'artiste par la voie orale.