Ebranlée par l'affaire des caricatures, l'Europe tente de redresser sa position vis-à-vis des pays arabes. La tournée qu'effectue actuellement le Haut représentant de l'Union européenne (UE) pour la politique étrangère, Javier Solana, dans la région du Proche- Orient, n'est pas du tout une coïncidence. Cela confirme que l'Europe craint sérieusement de perdre ses relations avec les pays arabes, lesquels menacent de boycotter ses produits. Voulant éviter le pire, elle a dépêché son émissaire pour tenter auprès des dirigeants arabes de corriger sa position et d'apaiser la tension. «A l'Union européenne, nous vouons un profond respect (aux musulmans) aujourd'hui comme hier et demain», a déclaré M.Solana à partir de Djeddah. Ce dernier s'est même entretenu hier avec le secrétaire général de l'Organisation de la conférence islamique (OCI), le Turc Ekmeleddin Ihsanoglu. Portant un message des dirigeants européens, le chef de la diplomatie voulait expliquer que sa communauté a toujours respecté la religion musulmane. «Nous n'avions jamais voulu, et en aucun cas, offenser leurs sentiments. Cela n'a pas été notre intention, elle ne l'a pas été et elle ne le sera pas», ajoute l'émissaire. Ce dernier regrette le fait que les gens dans le monde musulman commencent à ressentir cela comme un nouveau 11 septembre dirigé contre eux. De son côté, le secrétaire général de l'OCI a souhaité que l'UE combatte «l'islamophobie» par l'adoption au Parlement européen d'une législation appropriée. «Les pays membres de l'OCI attendent de l'UE qu'elle identifie l'islamophobie comme un phénomène dangereux à surveiller et à combattre comme c'est le cas pour la xénophobie et l'antisémitisme», avait indiqué samedi dernier le secrétariat général de l'OCI dans un communiqué. L'organisation a appelé l'UE à créer les mécanismes appropriés de surveillance et à reconsidérer sa législation afin de prévenir «(...) la répétition des récents événements malheureux», en référence aux réactions violentes aux caricatures dans des pays islamiques. M.Ihsanoglu a proposé que le futur Conseil des Nations unies pour les droits de l'Homme, devant remplacer l'actuelle Commission des droits de l'Homme dans le cadre d'une réforme de l'ONU, prévoie dans ses statuts «le respect de toutes les religions et l'interdiction de diffamer les religions et les prophètes». Voulant faire preuve de bonne volonté, M.Solana dira: «Si, dans la mise en place du nouveau Conseil des droits de l'Homme (...), il y a une clause pour le respect de ces sentiments, il n'y aurait pas d'objection à cela». Il a même tenu à rassurer qu'il fera son possible pour que de telles choses ne se répètent pas. Il a estimé cependant qu'il n'était pas toujours facile de faire respecter la loi. M.Solana s'est également entretenu avec son homologue saoudien, le prince Saoud Al Fayçal et le roi Abdallah. Après l'Arabie Saoudite, il se rendra au Caire où il rencontrera le président Hosni Moubarak et le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. L'envoyé spécial de l'UE va-t-il réussir sa mission et apaiser la tension? Sachant que le gouvernement danois refuse de présenter des excuses, il serait vraiment difficile d'atténuer la colère des musulmans.