Le ministre de la Justice et garde des Sceaux n'exclut personne. Les têtes de proue du mouvement islamiste bénéficieront des mesures d'élargissement prévues par l'ordonnance d'application de Charte pour la paix et la réconciliation. Ali Benhadj, numéro deux de l'ex-FIS, Abdelhak Layada, fondateur du GIA, ainsi que Amar Saifi - alias El Para- l'ex-émir du Gspc, seront relâchés. C'est ce qui ressort de la déclaration faite samedi par Tayeb Belaiz, ministre de la Justice et garde des Sceaux, en marge de l'ouverture de la session de printemps de l'APN. Rappelons que l'arrestation de Layada remonte à juin 1993 au Maroc. L'ancien ministre de la Défense Khaled Nezzar s'est déplacé au Maroc pour négocier son extradition, chose qu'il a obtenue sans grande difficulté. Mais Layada a, par la suite -par le biais d'une lettre de son fils-, déclaré avoir été hébergé dans un palace par les Marocains dans le but de l'amener à les aider dans l'affaire du Sahara occidental. Extradé vers l'Algérie, il a été condamné à la prison à vie, en 1994, dans l'affaire en relation avec l'assassinat du journaliste Tahar Djaout. Sa libération a été revendiquée par le groupe du GIA, commandité par Djamel Zitouni, qui avait détourné l'Airbus d'Air France en décembre 1994. On l'a ensuite retrouvé dans la mutinerie de Serkadji qui a fait 93 morts. Il a servi de bons offices, avec feu Abdelkader Hachani, entre les mutins et les services de l'ordre. Il a été autorisé récemment à assister aux funérailles de sa mère. Sa famille semble très optimiste quant à sa prochaine libération. Layada est reconnu aujourd'hui comme étant le véritable fondateur du Groupe islamique armé (GIA). Saifi a fait l'objet de négociations serrées avec les opposants tchadiens qui l'ont remis l'année dernière aux autorités algériennes. Benhadj a été enfin conduit à la prison d'El-Harrach, suite à la déclaration qu'il avait faite à la chaîne Al Jazeera au sujet des diplomates algériens enlevés puis assassinés en Irak. Belaiz n'exclut aucun de ces trois chefs qui résument les grandes tendances de l'islamisme radical en Algérie. Ces mesures d'élargissement concernent 2629 personnes pendant la première semaine, selon l'estimatif de Belaiz. Il s'agit des personnes qui ont été arrêtées pour des motifs liés aux actes de violence. L'arrestation d'un certain nombre remonte au tout début de la crise, à janvier 1992. Ils ont été, au début, placés dans les camps d'internement du sud puis repris et emprisonnés parce que suspectés d'avoir des liens étroits avec les groupes armés. Les plus chanceux ont été libérés samedi. Quelque 150 personnes ont bénéficié de cet élargissement dès le premier jour. Les autres seront relâchés au fur et à mesure de la finalisation de la procédure administrative, indique le ministre. Mais l'opération exclut ceux qui ont commis des viols, des assassinats collectifs ou utilisé des explosifs dans les lieux publics. Ces mesures mettent en exergue la partie la plus importante de la Charte pour la paix et la réconciliation. Car il faut rappeler que la «loi de concorde civile», plébiscitée également par le peuple, ne leur a pas permis de sortir de prison en 2006. Les choses semblent avoir évolué en 2006 même si des parties représentatives de la société civile la trouvent insuffisante, particulièrement contraignante sur son aspect relatif aux libertés, aux témoignages et enquêtes. L'ordonnance d'application de la Charte englobe tous les chefs de l'ex-FIS qui sont internés depuis le début du conflit. Elle représente l'acte deux de la réconciliation nationale qui reste à parfaire dans son troisième. Les deux chambres du parlement s'apprêtent à adopter le texte qui a déjà été publié dans le Journal Officiel et est entré en vigueur depuis mercredi dernier.