Dialectique. Si la célébration de l'indépendance de l'Algérie est liée à la date du 5 juillet, il est incontestable qu'elle ne peut être dissociée de celle du 19 mars 1962. Une date majeure dans l'histoire de l'Algérie, elle a signé la fin d'un colonialisme sauvage qui a acté son accession à l'indépendance. Une pièce maîtresse du puzzle, du processus de décolonisation du pays, qui s'est soldé par la fin de l'Empire colonial français et celui de l'Algérie française. Un dernier virage qui permet aujourd'hui de commémorer une liberté chèrement acquise tous les 5 juillet. Un parcours du combattant. Il aura fallu plus d'une année de tractations pour aboutir à la fin d'une Guerre de Libération nationale qui aura duré plus de sept ans, après une colonisation sauvage de 132 ans. Elles aboutiront à ces fameux accords d'Evian qui ont servi de tremplin au 5 juillet. Un legs, un héritage précieux dont le prix n'a d'égal que les sacrifices, le don de soi de femmes et d'hommes, jeunes, d'exception pour une patrie martyrisée. Un modèle pour ceux qui ambitionnent, aujourd'hui, de construire cette Algérie nouvelle, celle dont la trajectoire a été déviée. Le nom de Krim Belkacem demeure à ce titre une référence et reste intimement lié à cette Algérie une et indivisible dont ont rêvé lui et ses compagnons d'armes. Retour sur des tractations qui auront duré près d'une année. Elles auront lieu aux Rousses, près de la frontière suisse... Il sera question de mettre fin à une colonisation féroce de plus d'un siècle. Krim est à la tête de la délégation qui va négocier l'indépendance de l'Algérie, secondé par des hommes qui feront briller de mille feux une diplomatie née dans les maquis. Les pourparlers peuvent commencer, mais sans témoin. Que veut-on cacher au monde? Cette plaie béante qui s´appelle Algérie, solidement accrochée et tatouée au fronton de la patrie des droits de l´homme? Ou bien, tout simplement, la détermination farouche d´indépendance d´une poignée de jeunes Algériens emmenés par celui que l´on surnomma «le Lion des djebels»? À ce moment-là, personne ne savait que le sort du mythe de l´Algérie française serait définitivement scellé le 18 mars 1962 à l'hôtel du Parc, à Evian-les-Bains (en Haute-Savoie, France). La délégation algérienne présidée par Krim Belkacem secondé par ses compagnons de lutte, jeunes et brillants: Mohamed Seddik Benyahia, Rédha Malek, Tayeb Boulahrouf, Ahmed Boumendjel, Saâd Dahlab, Ahmed Francis, M'hamed Yazid... ne cèderont pas d´un pouce. Ils seront sans concession. Comme à la première heure. Celle où ils ont décidé de se donner corps et âme pour l'indépendance de cette terre martyrisée qui les a vu naître. C'est autour de sacrifices inouïs et d'un don de soi sans égal qu'a pu être enfin caressé ce qui ne semblait être à l'origine qu'un inaccessible rêve. C'est d'outre-tombe que nous parviennent aujourd'hui les témoignages de ceux qui en ont tracé le sillon. Un parcours tragique durant lequel ils ont eu à subir la barbarie, la sauvagerie de leurs tortionnaires, qui, ultime sacrilège, les ont privés d'une sépulture décente depuis plus de 170 ans. Une page déchirante écrite par ces 24 valeureux résistants et leurs compagnons d'armes dont les ossements ont été rapatriés pour reposer, aujourd'hui, enfin dans cette terre libérée qui les a vu naitre. Ironie de l'histoire, ils seront enterrés un 5 Juillet fête de l'indépendance de leur patrie enfin retrouvée dont le 19 mars a mis les pieds à l'étrier. Un pied de nez, posthume, à leurs tortionnaires.