Depuis la remise en liberté conditionnelle de certaines figures du Hirak, de nombreux observateurs accordent une volonté de dialogue aux nouvelles autorités politiques et y décèlent une sorte d'amorce de dégel du climat politique. Il s'agit d'un enclenchement du processus de baisse de tension sur la voie de l'apaisement du climat politique. En revanche, les politiques, qui ont beaucoup à perdre dans une démarche d'apaisement, veulent accréditer la thèse d'une «autre manoeuvre». Certes les familles et les proches des détenus ont été soulagés et ceux qui demeuraient encore en prison espèrent qu'ils seront libérés à leur tour, en revanche les militants et les activistes du Mouvement populaire restent prudents. Ce geste d'apaisement en appelle d'autres. Cet élargissement a suscité de multiples appels à la libération de tous les détenus qui croupissent encore en prison et à leur indemnisation et réhabilitation. Les conditions de leur arrestation et emprisonnement sont mises en exergue. Selon le Comité national pour la libération des détenus (Cnld), près d'une centaine d'activistes sont actuellement en prison, la plupart pour des publications sur Facebook. Déjà mis à mal par le confinement dans le cadre de la prévention contre la propagation de la pandémie de coronavirus, le retour de la grande mobilisation serait, indique-t-on, «tributaire de l'évolution des rapports de force entre les différentes tendances au sein du pouvoir en place». Ces libérations seront-elles suffisantes pour calmer la contestation? Il y a de fortes chances, car il existe une disponibilité à l'apaisement qui semble s'inscrire dans la durée. Dans la foulée de l'investiture du président de la République, la justice a libéré près de 80 détenus. Dans une logique de torpiller la disponibilité au dialogue, des cercles radicaux ont multiplié les provocations ouvertes à l'endroit de l'Etat et ont manipulé des jeunes, pour ce faire. Une vague d'interpellations s'en est logiquement suivie. Dans le doute des intentions de l'Etat et en raison du brouillage, piloté de l'étranger, de nombreux militants n'ont pas souhaité tirer des conclusions hâtives quant à l'amorce du processus d'apaisement, en vue d'une solution globale à la crise. Quoique pour les plus optimistes, cette intention d'aller vers un apaisement en vue d'opérer un changement de cap, n'est pas totalement écartée, à la faveur de la libération simultanée et la grâce des détenus dont des figures du Hirak. Selon certains, pour venir à bout de cette protestation qui enfle, seule la relaxe, suivie d'une réhabilitation de tous les détenus sans distinction aucune et la cessation des arrestations pourront constituer un signal fort à l'endroit du Hirak. Il faut noter que la non-libération du journaliste Khaled Drarni a suscité des incompréhensions, d'autant plus qu'il a été arrêté le même jour et pour les mêmes faits que ceux qui ont été élargis à l'instar de Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche. À ce propos, il faut noter que les hautes autorités du pays promettent de maintenir la cadence de libération des détenus d'opinion et politiques. Pour rappel, plusieurs détenus politiques et d'opinion ont été libérés le 2 juillet dernier, à l'instar de Karim Tabbou, Samir Benlarbi ou Amira Bouraoui. Par ailleurs, plusieurs observateurs mettent en garde contre l'organisation Rachad, en ce temps d'hibernation du Hirak. Cette organisation est à l'affût de la moindre occasion pour surfer sur la vague du Mouvement populaire, dans le but de se refaire une virginité et de reprendre l'initiative politique. L'ultime objectif de cette organisation est de confisquer le soulèvement populaire du 22 février en sa faveur et de revenir par la grande porte.