Le ‘‘contrat première embauche'' met en fait en péril la carrière politique du Premier ministre. La mobilisation de la jeunesse, des étudiants et des syndicats ne se démentait pas ces derniers jours et met à mal les projets politiques du Premier ministre français Dominique de Villepin qui risque, selon les observateurs, de connaître le sort d'un ancien chef du gouvernement français, Edouard Balladur. C'est ainsi que l'hebdomadaire dominical français, Le Journal du Dimanche s'interrogeait -au lendemain de l'évacuation musclée, le 12 mars dernier, de la Sorbonne occupée par les étudiants, «Villepin en instance de Balladurisation?», qui rappelle que l'ancien Premier ministre de droite, Edouard Balladur, avait dû reculer en 1994 sur un projet de contrat de travail qui abaissait le salaire minimum pour les jeunes. Un an plus tard, il perdait la présidentielle face à Jacques Chirac. La France qui sortait d'une crise des banlieues en novembre dernier n'avait manifestement pas les moyens de s'en payer une autre à caractère social provoquée par le ‘‘Contrat première embauche'' CPE -un contrat à durée indéterminée destiné aux jeunes de moins de 26 ans- qui devait, selon ses concepteurs, contribuer à réduire le chômage parmi les jeunes touchés de plein fouet par la crise du travail. Mais le CPE, très mal compris tant par les intéressés que par les syndicats, a provoqué la colère de la jeunesse, colère qui s'est traduite par des manifestations montres à travers le territoire français depuis le début du mois de mars. Manifestations qui avaient alors atteint un summum le 7 mars derniers ou de 5.000.000 à un million de personnes ont occupé les rues de France. De fait, la situation n'a cessé de se dégrader au moment ou la cote du Premier ministre, potentiel candidat de la droite aux élections présidentielles de 2007, connaissait une chute libre dans les sondages. Face à cette dérive et la persistance de la colère populaire, le président français, Jacques Chirac, est monté vendredi, à la veille d'une nouvelle manifestation de masse, au créneau à la rescousse de son Premier ministre malmené par un «non» social qui prend les allures d'un mai 1968. De fait, la France n'a plus connu de telles manifestations depuis la révolte des étudiants en 1968, ce qui a contraint le président Chirac à payer de sa personne appelant ses concitoyens au calme et au dialogue, appréhendant un dérapage qui n'arrangerait pas les affaires de son parti dans une année pré-électorale. Mais l'intervention du président Chirac ne vient-elle pas un peu tard, d'autant plus que M.de Villepin s'est montré ces dernières semaines inflexible affirmant qu'il n'y aurait pas de recul sur le CPE -il l'a fait adopter par la majorité parlementaire de droite la veille des manifestations du 12 mars-.? De fait, la persistance de la mobilisation, les incidents qui se sont produits ici et là, notamment dans la région parisienne, font craindre aux autorités françaises un remake des émeutes de novembre dans les banlieues des grandes villes. M.Chirac en appelait, vendredi, à «la responsabilité de chacun» pour que les manifestations prévues hier en France aient lieu «dans le calme et le respect de tous». Le rejet par les jeunes du contrat première embauche à induit des incidences sur le devenir politique de Dominique de Villepin quelque peu coincé par une fermeté qui ne sert pas ses desseins, en refusant de discuter ou d'amender un projet rejeté par l'opposition de gauche qui continue à demander son retrait car, selon les socialistes français, le CPE ne concourt d'aucune manière à remédier, aussi peu soit-il, à la crise du chômage qui touche près de 10% des Français en âge de travailler, dont 23% d'entre eux sont des jeunes. De fait, les parlementaires socialistes ont déposé un recours devant le Conseil constitutionnel dans l'espoir que celui-ci en ordonne le retrait. Toutefois, une telle issue serait une défaite majeure pour M.de Villepin qui a beaucoup misé sur le CPE en ne sachant pas, sans doute, faire les concessions qui s'imposaient pour obtenir un consensus national sur le CPE. Autre conséquence des retombées du CPE est l'effritement de plus en plus visible du soutien tacitement accordé au Premier ministre par la majorité de droite dont certains ténors se sont joints à ceux réclamant le retrait du projet de contrat de travail pour les jeunes. Cependant, les difficultés de M.de Villepin, ne semblent pas devoir profiter à son principal concurrent, le ministre de l'Intérieur et chef de l'UMP (Union de la majorité présidentielle), Nicolas Sarkozy, se trouvant également dans le creux de la vague. De fait, c'est toute la droite française qui risque de se retrouver orpheline d'un candidat de poids à moins d'une année de la présidentielle de 2007. En effet, si M.de Villepin, par ses maladresses et sa raideur, -que d'aucuns assimilent à de la morgue- semble avoir raté le coche, M.Sarkozy par ses outrances verbales, notamment, n'a pas su mettre à hauteur d'homme d'Etat, tirer profit de la mauvaise passe que traverse son alter ego, en se donnant le profil de rassembleur de la majorité présidentielle, pénalisant ainsi la droite française qui risque de se présenter en 2007 sans chef véritable face aux socialistes et à la gauche en général.