Sorti sous le label Wing It, «Je n'ai pas les mots» est le 3ème album de Dendana qui signifie «musique». En effet, après «Dendana Project» sorti en 2013 et «Melody» sorti en 2018, Nassim Dendane, alias Dendane vient de sortir «Je n'ai pas les mots». À l'image de sa pochette, colorée, lumineuse, mais aussi amère, il illustre avec justesse la traversée entre les rives nord-africaines et européennes. Les 11 pièces de cet album, joyeuses et nostalgiques, sont axées autour d'un titre pivot «Nord-Sud» qui définit sa trajectoire de l'Algérie vers la France. Les rythmes gnawa, touareg, afro-samba côtoient étroitement la chanson française aux influences plurielles, à l'image d'un pays aux multiples origines. Compositeur, arrangeur et guitariste aux influences blues & folk du désert, Dendana chante l'Autre, celui qu'il est devenu en quittant son pays («Nemchi Biid», «Paris»), mais aussi pour l'Autre, celui qu'il invite à s'ouvrir à la liberté, à ne pas craindre la différence («la Rumeur», «l'Arabe», «Passer ma route»). Une ouverture qui se ressent dans la voix de ses invités; Charlotte Savary cosigne quelques titres, chante sur l'aérien «Rising of the Veil» et arrange les choeurs de l'album. Ben l'Oncle Soul fait une apparition lumineuse en évoquant sa nouvelle paternité sur le duo «Father & Child». L'Autre et soi Rodrigo Viana harmonise dans un même souffle, le majestueux «Tout Finira». Pour façonner un son chaud et moderne, Dendana fait appel à des musiciens d'univers éclectiques (Timothée Robert, Tao Erlich, Pierre Danel, Nirina Rakotomavo) qui apportent chacun leur couleur aux arrangements. Ils enregistrent «à l'ancienne», en live et en analogique, sous l'oreille attentive de Mathieu Gibert du studio One Two Pass It: le son est naturel, ample, habité par la chaleur de la lampe. Douceur dans la voix, qui rappelle un peu celle de William Chedid, de la nostalgie dans l'ambiance tantôt feutrée, qui rappelle les ballades nocturnes et nostalgiques, cet album qui s'écoute nonchalamment, nous emporte loin par instant quand la voix se fait caresse et sensualité. Ambiance voyage et nostalgie Dans cet album chanté dans les trois langues arabe, française et anglaise, c'est un melting pot de sonorités diverses alliant le gnawi à petites doses, à la pop, la musique saoul. Dans ces morceaux où le cuivre sonne tout comme la guitare qui tourne en boucle, donne à écouter des sujets qui invitent souvent à l'amour et à la paix. Un album qui se veut engagé et humaniste à souhait. Il y a de la tendresse parfois, de la mélancolie, une voix qui berce, un rythme qui frôle la transe par endroit, mais de la sérénité surtout et du baume à l'âme. «Je n'ai pas les mots» laisse entendre en effet, la profondeur d'un chant qui vient de l'intérieur pour toucher les âmes et les coeurs. C'est presque un appel à consolation, un hymne au geste affectueux, un sourire gratuit et de l'amour à profusion. Un album qui s'écoute tendrement. À la question de savoir pourquoi ce style de musique? le jeune chanteur nous répond: «Parce que j'aime la musique qui n'a pas de frontières. J'ai fait du classique quand j'étais enfant, j'ai grandi avec des artistes comme the Beatles, James Taylor, Bob Marley, Stevie Wonder. Adolescent j'ai fait la découverte de la musique du désert et c'est la que j'ai compris qu'il fallait que je puise dans l'Algérie qui est en moi et lui donner de l'harmonie.»