Sans bruit et sans tapage médiatique, ces centaines de citoyens jaloux de l'histoire de leur glorieuse révolution ont initié une pétition dans laquelle ils exhortent le président de la République à accéder à cette demande d'«ériger un mémorial pour les amis de l'Algérie indépendante». Le mémorial dont il est question «se veut un lieu de recueillement, d'évocation de souvenirs autour d'idéaux partagés, de ressourcement, de rencontres, de diffusion et de partage de connaissances et de documentation», affirme Mahmoud Chabane, un des initiateurs de cette pétition, expliquant que ce geste sera la meilleure manière de rendre hommage à ceux qui ont bravé la mort et la torture pour se ranger du côté des Algériens qui luttaient pour leur indépendance. L'initiative est louable, la symbolique est très forte, surtout dans le contexte actuel où le racisme et l'islamophobie squattent le débat public en France. Pour Chabane, cette initiative doit être comprise comme le prolongement du grandiose Mouvement populaire déclenché en février 2019, qui «s'est réapproprié de manière pacifique et civilisée forçant le respect, la considération et l'admiration de tous les peuples». En outre, ce mémorial ne manquera pas de générer des retombées positives immenses sur tous les plans (historique, économique, diplomatique, culturel, touristique) qui seront, sans l'ombre d'un doute, à la hauteur du prestige dont jouissait notre pays avant d'être balafré, dévasté et humilié par des décideurs et gouvernants prédateurs. Il est vrai que d'aucuns diront que cet attachement à la mémoire collective est moins évident que pour ceux, du fait que leur jeunesse n'a pas connu les affres du colonialisme français, de percevoir la portée plus que symbolique de cette importante proposition et d'en apprécier les retombées escomptées. On dit souvent que les grands esprits se croisent et les grandes idées sont fécondes. Presque la même demande a été exprimée, en septembre dernier, par l'actuel directeur du Monde diplomatique, Serge Halimi, fils de la défunte militante de la cause algérienne, Gisèle Halimi. Dans une lettre de remerciements adressée au président Abdelmadjid Tebboune, le fils de Gisèle Halimi lui a exprimé sa gratitude. «Il est bon de rappeler que quelques Français démontrèrent leur courage et leur universalisme, en même temps qu'ils défendirent l'honneur de leur pays, lorsqu'ils prirent le parti du peuple algérien alors que leur armée s'embourbait dans la voie de la répression et des tortures», écrit Halimi dans sa lettre de remerciements au président Tebboune, avant de formuler discrètement et habilement une demande: «Si ma mère n'est plus là, cette mémoire mérite, je crois, de rester vivante. Pourquoi pas une place, un édifice public, un boulevard, une cité qui portera le nom de cette Grande dame. Cette promesse a été faite par le président tunisien qui a, en effet, l'intention de donner à une place de Tunis ou de la Goulette, le nom de Gisèle Halimi.» «Je sais qu'elle aurait également aimé que l'Algérie signale, de cette manière, que des avocats français se sont rangés aux côtés de son peuple pour défendre la cause de la liberté», a conclu Serge Halimi.