Le devoir d'informer semble être incompatible avec les moult raisons d'Etat qui empêchent souvent la publication d'informations «sensibles». Encore une fois, la presse algérienne vient d'en faire l'expérience à ses dépens. Ces deux inconciliables paramètres n'étant bien entendu pas l'apanage de l'Algérie, qui, bien que faisant l'apprentissage encore récent de la démocratie, ne diffère donc en rien en la matière du reste du monde. Les plus grandes nations enregistrant souvent des bavures qui portent souvent des coups douloureux à la liberté d'informer. Néanmoins, le récent cas vécu par le quotidien arabophone El Khabar, et qui a vu la publication d'une information mentionnant l'appel du Gspc aux repentis de la réconciliation nationale de regagner ses rangs, dérange sûrement du fait de la fragilité d'une paix qui reste encore à consolider. Il est patent néanmoins dans cette affaire qui a vu la mise sous mandat de dépôt d'un citoyen et de deux autres policiers, le premier pour avoir aidé à la publication d'une information portant atteinte à la sécurité de l'Etat et les seconds pour avoir divulgué un secret professionnel, que «la forme n'y est pas encore» du moins c'est ce que dénonce la corporation des journalistes. Laquelle a fait les frais de cette information malvenue, en constatant, impuissante, la mise sous contrôle judiciaire d'un de ses confrères, à savoir Mourad M'hammed, qui aurait vécu un véritable cauchemar le week-end dernier dans les locaux du commissariat de la rue Dr Saâdane, à Alger, où il fut sommé de communiquer ses sources. Soit. Mais il est encore et surtout reproché à la justice d'avoir fait l'amalgame entre l'information et l'atteinte à la sécurité de l'Etat. L'on s'interroge notamment de la part du collectif d'El Khabar sur les bases juridiques dont s'est inspiré le magistrat pour asséner un tel verdict, jugé trop lourd. Rappelons que la FIJ (Fédération internationale des journalistes) vient d'appeler les autorités algériennes à «respecter les lois en vigueur qui habilitent la justice à demander à un journaliste ou à un média de révéler ses sources lorsque le caractère d'exception nécessitant le recours à une telle extrémité est établi» alors que le Syndicat des journalistes (SNJ) a, lui aussi, immédiatement réagi pour dénoncer le supplice moral subi par le journaliste mis en cause. Ainsi, le droit d'accès à l'information qui est reconnu aux journalistes par l'article 35 du code de l'information, semble plus que jamais rattrapé dans cette affaire par ses succédanés directs, que sont les articles 36 et 37 qui stipulent que le droit d'accès aux sources de l'information n'autorise pas le journaliste à publier ou à divulguer des informations de nature à porter atteinte à la sécurité nationale, l'unité nationale ou la sécurité de l'Etat. De même que le secret professionnel ne peut être opposé à l'autorité judiciaire compétente dans le cas où l'information porte atteinte à la sécurité de l'Etat de façon manifeste. L'équipe d'El Khabar soutient, quant à elle, qu'il est dans ce cas précis difficile d'établir un lien édifiant entre l'article de son journaliste et l'atteinte à l'intérêt national. Sur quelles bases juridiques s'inspirera la justice pour établir son verdict? s'interroge-t-on.