Les derniers prisonniers islamistes, les plus connus, connaissent des fortunes diverses. Djamel-Eddine Laskri, Abdelkader Chakendi, Lembarek Boumaârafi, Fouad Boulamia et Amari Saïfi plus connu sous le nom de «Abderrezak El-Para», sont les derniers détenus islamistes à ne pas avoir bénéficié de la libération, qui a touché plus de 2 000 islamistes impliqués dans des actes liés au terrorisme. Les derniers détenus islamistes, les plus connus, connaissent des fortunes diverses, et si pour certains, le maintien en détention se précise, pour d'autres, la promesse d'une libération prochaine suscite l'espoir chez leurs familles. De famille aisée, intellectuel à la verve reconnue, Djamel-Eddine Laskri, depuis treize ans dans la prison de Batna, «ne tardera pas à être libéré», selon une source du ministère de la Justice. Arrêté à la suite de l'attentat contre l'aéroport d'Alger, en juillet 1992, Laskri est accusé d'avoir fourni de l'aide aux auteurs des attentats. Lui a toujours clamé son innocence, bien qu'il reconnaît son appartenance, ou pour le moins, ses relations avec le groupe accusé de l'attentat. Abdelkader Chakendi, qui avait fait la «une» de la presse nationale en 1992, sous le nom de «Lasnami», croupit dans la prison de Serkadji dans l'anonymat total. Celui qui avait pris les armes avec les Allel, Miliani et les premiers groupes armés, est vite oublié. Même dans la prison, il a été renié de la part de ses codétenus qui lui reprochent une aura factice «et bien d'autres choses». Même s'il est relâché aujourd'hui, c'est un homme totalement oublié, réduit à rien, qui quittera Serkadji au bout de treize années d'emprisonnement. Lembarek Boumaârafi, auteur du régicide contre le chef de l'Etat, Mohamed Boudiaf, est le prisonnier le plus célèbre. Pensionnaire de la prison algéroise de Serkadji, il a été transféré dans une prison de haute sécurité à partir de 1995. Aujourd'hui, personne ne doute que c'était bien lui qui a tiré sur le président en juin 1992. Elément brillant du corps spécial de sécurité, séduit par l'islamisme, Boumaârafi, selon des sources sécuritaires dignes de foi, «ne sera pas libérable», le régicide restant, dans la législation, une loi hors de portée des textes consacrant la réconciliation. Le régicide Boumaârafi avait été condamné à mort, mais sa peine a été commuée à la détention à perpétuité, l'Algérie ayant suspendu les condamnations à la peine capitale depuis août 1993. Il y a quelques années pourtant, Fatiha Boudiaf, la femme du président assassiné, avait émis le souhait de le voir libéré, afin qu'il puisse, selon elle, «parler en toute liberté de ce qui s'était réellement passé». Fouad Boulamia, lui aussi, ne bénéficiera vraisemblablement pas de la libération dans le cadre des textes de loi portant réconciliation nationale. Deux raisons sont invoquées : la première concerne la cible de son attentat, Abdelkader Hachani, dont la mort avait provoqué un choc, alors que Bouteflika venait à peine d'entamer son premier mandat et de dévoiler son projet politique de concorde civile. La lettre de soutien qu'il envoya à sa famille, au lendemain de l'attentat, le 22 novembre 1999, en disait long sur ce que le président pensait à l'époque. La seconde raison invoquée pour sa non-libération concerne son dossier entre les mains de la justice et sur la base duquel il ne peut ouvrir droit à la libération. Ledit dossier contient des informations selon lesquelles il aurait fait partie du groupe qui a commis le carnage de Bentalha. Les retournements et les volte-face qui ont émaillé son procès renseignent sur une nature tourmentée et un esprit versatile et introverti à l'extrême. Amari Saïfi, le célèbre «Abderrezak El-Para» du Gspc, celui qui défraya la chronique sécuritaire en 2003 en kidnappant 32 touristes européens à Illizi, puis en en prenant 14 en otages et en les faisant entrer au Kidal, du Niger, ne bénéficiera pas, lui non plus, de mesure de grâce. Maintenu en détention dans un lieu connu des seuls officiers supérieurs du renseignement, El-Para avait fait sensation en 2003 et 2004 dans une course-poursuite et un battage médiatique exceptionnel. Après avoir empoché la rançon (6 millions d'euros) au Niger, où il prit la route, il accrocha l'armée régulière nigérienne dans le désert du Ténéré, puis poussa jusqu'au Tibesti du Tchad où il tomba entre les mains d'une organisation rebelle et en guerre contre le régime de Deby, le Mdjt. En pleine détention, El-Para «accorda» un entretien à Paris-Match et fit l'objet de reportages en France et en Allemagne. L'une des principales raisons à sa non-libération reste les mandats d'arrêt internationaux lancés à son encontre par au moins deux pays.