Près de 2500 détenus impliqués dans des affaires liées au terrorisme -non entachées de crimes de sang- bénéficieront d'une remise en liberté. Les magistrats traitent les derniers dossiers des islamistes encore en détention ou résidant à l'étranger afin de clore un des chapitres les plus controversés de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Rappelés en plein congé par le ministre de la Justice pour donner un coup d'accélérateur aux dossiers encore en suspens, les magistrats sont actuellement en phase finale de leur travail, qui aura pris un peu plus de sept mois. Des cas comme ceux de l'assassin du président Mohamed Boudiaf, Mbarek Boumaârafi, de celui de Abdelkader Hachani, Fouad Boulamia, les cas de Abdelkader Chakendi, Amari Saïfi et Djamel-eddine Laskri, les plus connus des islamistes encore en détention, ont vraisemblablement leur issue. Certains bénéficieront des mesures d'élargissement, d'autres ne pourront en bénéficier au vu de la gravité ou de l'imprescriptibilité de leurs crimes. La justice a été le premier secteur à appliquer les mesures d'apaisement de la Charte pour la paix, en procédant, dès le mois de mars, à la libération des premiers détenus dans des affaires liées au terrorisme. Les chiffres officiels des disparus, des détenus, des travailleurs licenciés et des familles touchées par la tragédie ont été communiqués à l'opinion publique au mois d'avril par la Commission de suivi de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Les services du chef du gouvernement avaient diffusé un communiqué, à l'issue de la réunion de la Commission de suivi de l'application de la Charte pour la paix et la réconciliation. «La liste consolidée» comportait 7100 cas transmis à l'ensemble des commissions de wilaya. Parmi eux, on comptait «3000 disparus qui ont fait l'objet d'un jugement ou de décès». «Plus de 7000 personnes se réclamant de lien de parenté avec des personnes disparues ont déjà été reçues au niveau des différentes commissions de wilaya compétentes», précisait aussi le communiqué. Dans le même temps, «la Commission nationale de suivi a ordonné aux walis et aux présidents des commissions compétentes, de veiller à ce que les familles des disparus, déjà en possession d'un jugement de décès, soient pleinement assistées dans la finalisation des dossiers d'indemnisation et que celles en attente d'un jugement de décès soient assistées dans leur démarche envers la justice». Par ailleurs, «près de 2200 détenus ont été libérés, soit la quasi-totalité des personnes concernées». On notait la libération durant le mois de mars de Ali Benhadj et de Abdelhaq Layada, deux chefs emblématiques des islamistes, aux fins de donner des gages de bonne volonté de la part des autorités. Reste enfin le retour des leaders islamistes de l'étranger et auquel le président de la République tenait de manière très particulière, et qui reste un des points les plus obscurs de cette réconciliation. Ces chefs islamistes que le président avait pu convaincre de rentrer, n'avaient pas regagné Alger au 28 août, date de la fin de la période de grâce donnée par les autorités aux islamistes pour assainir leurs cas litigieux. Leur retour, on le sait, aurait donné de la crédibilité et de la consistance à l'offre de paix du président Bouteflika. Selon un des leaders de l'ex-Fis à l'étranger, «les membres de l'instance exécutive du parti dissous à l'étranger ont rempli les démarches de régularisation auprès des autorités consulaires depuis treize semaines, et il était prévu que les délais d'étude des dossiers ne dépasseraient pas les six semaines».On estime à un millier les dossiers des islamistes vivant dans quinze pays d'Europe et qui attendent d'être traités, et seulement une vingtaine ont pu recevoir une réponse les deux dernières semaines. Voilà où en étaient les choses au 26 août dernier, et on devine, dès lors, la colère du président Bouteflika, qui avait exigé en pleine période de vacances, le retour des magistrats afin d'instruire les dossiers en instance. La seule exception s'appelle Larbi Noui, qui vient de rentrer récemment en Algérie. Il y a deux jours, le ministre algérien de l´Intérieur, Nourredine Yazid Zerhouni, faisait une évaluation optimiste de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Il a indiqué à Alger que «des dispositions seront prises» pour que soit mise en oeuvre la Charte pour la réconciliation malgré l´expiration des délais. Cette loi, dont le bilan est qualifié de «mitigé» par les meilleurs spécialistes, donnait aux islamistes armés jusqu´au 31 août pour déposer leurs armes et bénéficier des dispositions de pardon. «Des dispositions seront prises après le 31 août pour la mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale», avait dit Nourredine Yazid Zerhouni, en marge d´une cérémonie de sortie de promotions de médecins officiers, d´officiers et agents de la Protection civile à Dar El-Beïda, à l'est d´Alger. «On ne va pas demander à celui qui descend du maquis pour déposer les armes d´y retourner», a-t-il souligné en réponse à ceux qui demandaient de quoi l'après-28 août sera-t-il fait, précisant en outre «qu´il y a des situations auxquelles on doit faire face». Le ministre a par ailleurs affirmé que «plus de 41.000 dossiers d´indemnisation des enfants et des veuves victimes de la tragédie nationale ont été déposés», qualifiant cette opération de «positive au profit de la paix et du pays». Six mois après l´entrée en vigueur, le 28 février, de ce texte de loi, les groupes armés tentent toujours, à travers la multiplication des attentats, de prouver qu´ils gardent une capacité de nuisance. Le ministre de l´Intérieur reconnaissait, le 20 août, que seuls 250 à 300 éléments de groupes armés s´étaient rendus aux autorités, alors que près de 800 de leurs acolytes sont toujours en activité, dans les maquis.