L'Algérie a vraiment serré la ceinture en 2020. En important l'équivalent de 18% en moins, sur un chiffre global de 34,4 milliards de dollars, le commerce extérieur n'a certainement pas réalisé une prouesse remarquable, mais il a tout de même fait la démonstration que le pays peut tourner avec moins d'argent. L'Algérie ne s'est pas effondrée en 2020, malgré une baisse historique de ses exportations de l'ordre de 33%. Les entreprises ont vendu pour 23,8 milliards de dollars, on l'aura deviné que ce chiffre a été réalisé à plus de 98% par Sonatrach. «2020 a été une année particulière en termes d'exportations et d'importations, du fait de la crise sanitaire que connaît le pays depuis mars dernier, et qui a amené le gouvernement à prendre plusieurs mesures visant à préserver les stocks des produits de base, à travers l'établissement d'une liste de 30 produits interdits à l'exportation pour une durée de 6 mois renouvelables», souligne un cadre du ministère du Commerce. Cela veut dire que les chiffres auraient pu être plus en faveur des exportations n'était-ce la Covid-19 qui a tout chamboulé. La particularité de 2020 n'aura pas empêché, apprend-on, certaines filières économique, industrielle et agricole, à l'instar du plastique, l'emballage, le ciment, le papier, les produits alimentaires et les dattes, de maintenir leurs activités d'exportation en 2020. Mais il faut aussi souligner la maigreur de ces exportations en valeur. Si l'on retient le «bon point» de la baisse des importations, le gouvernement semble tenir à l'engagement présidentiel de réaliser, pour 2021, un chiffre d'affaires de 5 milliards de dollars d'exportations hors hydrocarbures, tout en maintenant la pression sur les importations. Cette «prouesse» souhaitée pour 2021 est, bien entendu, conditionnée par l'Accord de la Zone arabe de libre-échange (Zale), celui préférentiel avec la Tunisie et aux conditions de réévaluation globale de l'Accord d'association avec l'Union européenne. Ce sont autant d'instruments susceptibles de booster les exportations, sauf qu'avec l'UE, principal partenaire de l'Algérie, ce n'est pas gagné d'avance. Le bilan de 10 années d'échanges commerciaux avec l'Union européenne confirme ce constat. Retour sur un marché de dupes. Fallait-il s'attendre à mieux? C'est ce qui était espéré, mais force est de reconnaître que l'Algérie n'était guère armée pour rivaliser avec un partenaire, voire prétendre à mieux lorsque l'on connaît les dysfonctionnements qui caractérisent son marché intérieur, d'une économie dont la sphère informelle y est prédominante drainant plus de 40% de la masse monétaire en circulation. Comment faire valoir, mettre en concurrence dans ces cas-là des produits locaux, ne répondant pas aux standards internationaux avec ceux importés, souvent moins chers et normalisés? Le fiasco était devenu inévitable. Les statistiques l'attestent. «Sur 10 années, le cumul des exportations algériennes hors hydrocarbures vers l'UE n'a même pas atteint les 14 milliards de dollars alors que le cumul des importations s'est chiffré à 220 milliards de dollars avec une moyenne annuelle de 22 milliards de dollars», indique un rapport de l'Agence nationale de promotion du commerce extérieur (Algex) rendu public le 21 juin 2016 qui a le mérite de faire la démonstration des errements d'une gestion économique prédatrice reposant sur la rente pétrolière. Un constat amer. L'Algérie, qui ambitionnait de se positionner sur le marché européen, constate, en effet, à ses dépens qu'hormis son gaz et son pétrole, ses produits hors hydrocarbures n'ont pas pu s'y imposer. L'Accord d'association Algérie-UE incontestablement mal négocié a fait la part belle aux «27» qui y ont trouvé leur compte. Un déséquilibre flagrant qui pénalise l'Algérie. Ce qui a conduit le président de la République à confier au ministre du Commerce, Kamel Rezig, le soin de «procéder à une évaluation du dossier sur l'Accord d'association avec l'Union européenne». Cet accord «doit faire l'objet d'une attention particulière, faisant valoir nos intérêts pour des relations équilibrées», avait recommandé Abdelmadjid Tebboune. Le ministère du Commerce n'en a pas fait cas jeudi. L'opportunité était pourtant servie sur un plateau pour faire un état des lieux des échanges commerciaux Algérie UE. Une occasion manquée? La question mérite d'être clarifiée. En tout état de cause, il s'agit de savoir valoriser «l'exploit» dans les importations et le rééditer dans les exportations, sans faire un point de fixation sur le partenaire européen. L'Afrique à elle-seule représente un marché de plus d'un milliard de consommateurs.