L'écrivain Youcef Dris vient de publier un nouveau livre intitulé: «Ziryab, le maitre de l'Andalousie». Originaire de la ville de Tizi Ouzou, Youcef Dris vit à Oran depuis 1996 où il a écrit et édité une infinité de livres. Mais dans le cas de Youcef Dris, ce qui retient le plus l'attention, c'est la diversité des genres et des thèmes auxquels il s'adonne avec une passion unique et exceptionnelle. Il a, en effet, publié des recueils de poésie, des romans, des biographies, dont une consacrée à El Hachemi Guerouabi, un essai sur les massacres du 17 octobre 1961, etc. Cette fois-ci, Youcef Dris change complètement de cap et de registre. D'emblée, Youcef Dris précise au sujet de son nouveau livre: «Je l'ai voulu un cadeau, pour les lecteurs, au goût de la mélodie et du rythme. Outre une introduction, un prologue (approche historique et psychologique) et une conclusion, il se décline en dix chapitres». Le livre revient ainsi sur la première apparition de Ziryab au palais de Haroun Errachid, le complot contre Ziryab et sa fuite vers l'Afrique du Nord puis vers l'Andalousie, le retour de Ziryab en terre africaine, l'explosion de ses talents et de son art. Youcef Dris revisite ainsi la musique andalouse de Cordoba à Tlemcen ainsi que la bibliographie consacrée à Ziryab. L'écrivain Youcef Dris souligne qu'après des mois de disette, et après avoir délaissé momentanément la méditation romantique, il s'est de nouveau orienté vers un essai «pointu» qui, espère-t-il, plaira aux puristes et aux profanes. Souvenirs d'enfance Pourquoi avoir écrit un livre sur ce génie de la musique andalouse? Réponse de Youcef Dris: «Tout petit, j'ai baigné dans l'univers musical, grâce à un papa mélomane, et qui, dès son jeune âge pouvait faire d'un simple roseau une magnifique flûte et en tirer des sons suaves. Il était aussi un excellent musicien, et les instruments à cordes vibraient sous ses doigts sans aucun effort, alors qu'il n'avait aucune formation dans ce domaine». Youcef Dris se souvient que devant l'échoppe d'horloger de son père, dans la ville de Tizi Ouzou, les passants avaient plaisir à s'arrêter un instant pour écouter des chansons provenant des 33 et 78 tours qui tournaient sans arrêt sur les phonographes. On pouvait alors, se délecter des chansons de Slimane Azem, Cheikh El Hasnaoui, cheikh Nourredine, Berthe Silva, la «Môme Piaf», Dario Moreno, Hadj M'rizek, Khlifa Belkacem, ou bien Rimiti, Beggar Hadda, Aïssa el Djarmouni et bien d'autres artistes encore de cette époque. Dans cette arrière-boutique de la rue de la Paix au centre-ville de Tizi Ouzou, ajoute Youcef Dris, d'autres vocations sont nées: elles ne sont que de simples fragments d'un horizon incommensurable, où tant de voix ont dû rester en silence, et quelques-unes ont envahi l'espace musical de belle manière, à l'image de cet invité inattendu de ce sanctuaire, le jeune Guerouabi qui venait d'Alger pour passer ses vacances scolaires chez sa soeur, épouse de l'horloger.«Le jeune garçon âgé alors de 10 ans, aimait à fréquenter cette «caverne d'Ali Baba» où il s'amusait à passer en boucle les disques 33 et 78 tours sur les phonographes des clients. C'est aussi dans cette arrière-boutique qu'il avait appris à faire ses premières notes de musique sur la mandoline de mon père qui n'était pas avare en conseils. Après être devenu le monument de la musique algérienne que le monde nous enviait, ce même Hadj El Hachemi Guerouabi a légué son art à Sid Ali Dris son neveu, et fils de l'horloger, qui est devenu lui-même auteur, compositeur et interprète de la musique populaire algérienne le chaâbi», précise encore Youcef Dris pour tenter de donner le maximum de critères lui ayant permis de s'être imprégné à ce point dans l'univers musical. Et d'ajouter que cette musique a réuni autour d'elle de nombreux cousins et neveux qui, avec succès, ont occupé l'espace artistique et culturel dans de nom-breux coins d'Algérie et en ont fait leur métier. Ce génie de la nouba «Ainsi est donc, la motivation première qui a donné naissance à cet ouvrage sur Ziryab. Ce génie de la nouba, n'est autre que le souvenir de ces moments précieux», souligne l'auteur en insistant sur le lexique varié, la richesse des métaphores, l'inventivité parfois mystérieuse du vocabulaire technique dont usait Ziryab pour faire comprendre aux autres la musique par les mots. «Ce sont autant de raisons qui m'ont poussé à écrire ce livre, parce que les liens que tissent entre elles la littérature et la musique sont tout à fait particuliers, et revêtent également un caractère complémentaire. À côté de cela, Ziryab s'est essayé à la photographie, et a bien réussi dans cette quête de la beauté, en tant que chasseur d'images, puisqu'il a sillonné le pays pour immortaliser bien des édifices et paysages aussi splendides les uns que les autres. Il n'est au monde des musiciens, des sculpteurs, des peintres, des poètes, qu'un adversaire, qu'un allié, qu'un dieu: le rythme que l'on rencontre à tous les carrefours de l'expression, à toutes les croisées de chemins de l'orage, et mon regretté père a dû le rencontrer dès son plus jeune âge pour être si doué. Et si j'ai choisi cette fois de parler de Ziryab, c'est que ce musicien paisible dont le génie, mûri par la patience, a rayonné en Andalousie et à travers le monde», explique l'auteur des «Amants de Padovani» avant de conclure: Ziryab a suscité un foisonnement d'émotions chez celles et ceux qui le connaissent, et en fournira encore plus pour celles et ceux qui le découvriront.