Est-ce l'effet du contrat de lobbying conclu par le parti Ennahdha de Rached Ghannouchi ou seulement l'effet du hasard, un haut responsable américain est arrivé, hier, à Tunis où il a été reçu par le président Kaïs Saïed qu'il a exhorté à nommer, le plus rapidement possible, un nouveau Premier ministre et à remettre le pays sur les rails d'une démocratie parlementaire, selon les termes du communiqué diffusé par la Maison-Blanche. Dans le communiqué de Carthage, intervenu en écho à celui de la diplomatie américaine, le chef de l'Etat tunisien a répondu qu'il n'y a «pas lieu de s'inquiéter au sujet de la liberté, la justice et la démocratie», en Tunisie. Jon Finer, adjoint du conseiller à la Sécurité nationale américain, Jake Sullivan, a remis au président tunisien un message du président Joe Biden, porteur du message pressant dans lequel les Etats-Unis «exhortent à un retour rapide de la Tunisie sur la voie de la démocratie parlementaire» comme aussi ils souhaitent la nomination rapide d'un «Premier ministre qui formerait un gouvernement compétent, capable de s'attaquer aux crises économique et sanitaire actuelles, en Tunisie». La réponse du président Kaïs Saïed a ainsi porté sur «les mesures exceptionnelles» intervenues le 25 juillet dernier, mesures qui, dit-il, s'inscrivent «dans le cadre de l'application de la Constitution et répondent aux attentes du peuple, sur fond de crises politique, économique et sociale». Le 25 juillet, il avait répondu aux nombreuses manifestations de la population, dans la capitale et plusieurs autres villes du pays, excédée par l'ampleur d'une crise sociale, économique et sanitaire sans précédent, en suspendant l'Assemblée des Représentants du Peuple (Parlement) pour une durée de trente jours et en mettant fin au gouvernement de Hichem Mechichi. De nombreuses autres mesures sont, ensuite, intervenues pour assainir un champ politique et administratif gravement miné. Ces décisions ont heurté des intérêts et des ambitions multiples et le fait que la Tunisie doit négocier avec le FMI un nouvel accord pour alléger le fardeau financier qui pèse sur l'économie du pays conduit nécessairement à une «inquiétude» de la communauté internationale. De là à tenter de remettre sur les rails les acteurs décriés par le peuple tunisien, il n'y a qu'un pas et il semble que la démarche est opérée qui se drape dans la préoccupation d'éviter à la Tunisie, «berceau des printemps arabes, un retour à l'autoritarisme». Mais le président Kaïs Saïed, assuré d'un large soutien de l'opinion tunisienne lasse des discours trompeurs et des manoeuvres politiciennes qui ignorent la situation dramatique dans laquelle se débat le peuple tout entier, à cause de nombreux mois de blocage politique et d'une pandémie meurtrière de Covid-19, entend mener la barque sans pression ni faux-fuyant pour garantir la pérennité du choix démocratique de 2011 que certains partis ont confisqué à leur profit quasi exclusif. Conscient des enjeux et pleinement déterminé à répondre aux attentes du peuple tunisien et de lui seul, le président Kaïs Saïed travaille, sans nul doute, à l'élaboration d'une feuille de route conforme aux exigences de la situation que traverse le Tunisie.