Le procureur général a attribué hier la responsabilité de la catastrophe aux membres de la direction. Au cinquième jour de l'ouverture du procès relatif au naufrage du Béchar, le procureur général a requis la prison à perpétuité pour les cinq membres de la direction de la Cnan. Il s'agit du P-DG, Ali Koudil, de MM.Ammour, Debah Mustapha, Zaoui Salah et Ikhdalen Kamel. Le représentant du ministère public a également requis cinq ans de prison ferme à l´encontre de quinze autres accusés et deux ans de prison ferme à l´encontre de deux accusés. Cette décision intervient, rappelons-le, au lendemain du témoignage des cadres de la compagnie, lesquels ont affirmé que la mise en place d´un dispositif de secours suffisant et adéquat aurait permis d´éviter la catastrophe qui a causé la mort de 17 membres d'équipage. Evoquant les résultats des enquêtes menées sur cette affaire, le procureur général auprès du tribunal d'Alger, a affirmé que «la responsabilité du naufrage incombe aux membres de la direction de la compagnie, lesquels n'ont pas respecté leurs engagements professionnels». «Ces derniers, poursuit-il, n'ont rien fait pour sauver les membres d'équipage». Le navire, comme l'avaient confirmé les témoins, non seulement manquait de tous les équipements de maintenance indispensables mais tous les certificats de validité étaient périmés. «Vu que la responsabilité humaine était à l'origine de ce drame, les sanctions doivent être plus répressives pour les accusés» a insisté le représentant du ministère public lors de l'audience, tout en affirmant que cette affaire servira de leçon. Il a appuyé les arguments avancés par une jeune avocate, Mlle Bechar, qui a représenté la partie civile et selon laquelle les conditions climatiques n'étaient pas une raison valable pour justifier la catastrophe. L'avocat a complètement rejeté la thèse de force majeure en rappelant, avec des détails précis, que le bulletin de météo spécial a été transmis, ce jour-là, tôt la matinée, à toutes les entreprises, en particulier les compagnies de navigation. Voulant démontrer à quel point le facteur humain est impliqué, l'avocat souligne que cet incident vient de dévoiler le manque de conscience et le dysfonctionnement relevé dans la gestion de l'entreprise. «S'il y avait une coordination et un système de secours, le drame n'aurait pas eu lieu puisque le premier SOS a été lancé à 16h 30 à partir d'un portable», a-t-elle dit, en précisant que jusqu´à 20h, le commandant de bord continuait à solliciter de l'aide mais en vain. Tout en reconstituant les événements, l'avocat dira que «ce qui s'est passé est inconcevable. Comment peut-on abandonner des vies humaines alors que le bateau était à 200 mètres seulement du port?» s'interroge-t-elle pour défendre avec verve les familles des victimes. «Les défaillances techniques dues à la négligence et au laisser-aller en sont les véritables causes», a-t-elle insisté devant la présidente. Par ailleurs, l´avocat de la défense, maître Mokrane Aït Larbi, a plaidé «non coupable», estimant que son client, le commandant du navire Batna, B.M.O, «a été chargé de commander un navire dépourvu des équipements nécessaires». Le nommé B.M.O poursuivi pour abandon du navire par le capitaine avant d´avoir été remplacé, précise l'avocat, s´est vu contraint de quitter le navire après 28 jours à bord et en a avisé son adjoint, pour le remplacer. Cependant, souligne l'avocat, les mauvaises conditions climatiques survenues ce jour n´avaient pas permis ce remplacement. Défendant son client, Mokrane Aït Larbi a déclaré que «la défaillance ne se situe pas au niveau des personnes mais au niveau des institutions qui sont autant coupables pour avoir failli à leur mission dans les opérations de sauvetage». Enfin, le procès devra se poursuivre également aujourd'hui par la plaidoirie des autres avocats de la défense avant les délibérations et le verdict.