Citant des géographes et des chercheurs, le magazine mensuel français Géo, rapporte la déliquescence des autorités marocaines qui «ferment les yeux» sur la culture du cannabis dans les montagnes du nord du Maroc où cette plante, qui est cultivée en famille, pousse comme du chiendent. Cette plante une fois séchée, est appelée kif, un mot qui vient de l'arabe «kayf», ou «plaisir». Le président de la Confédération des associations de Sanhadja du Rif», une puissante coalition de tribus berbères, Abdellatif Adebibe, cité par Géo, résume depuis sa maison familiale, juchée à 1800 mètres d'altitude, sur les flancs du mont Tidirhine (Nord), ainsi «Ici, c'est le point culminant du massif du Rif, pays du cèdre et du kif». La revue cite le géographe français Pierre-Arnaud Chouvy, spécialiste de la géopolitique des drogues, qui indique que «le seul à n'avoir jamais réussi à interdire le cannabis ici, c'est Abdelkrim El-Khattabi, l'illustre chef de guerre qui avait établi, entre 1921 et 1926, la République du Rif». Dans les années 1960 et 1970, les «hippies», qui avaient découvert le Maroc et le chanvre vendu au souk, «entre des bottes de menthe et de persil», initièrent les paysans rifains à la transformation de cet «or vert» en haschisch ou résine de cannabis, une technique venue du Liban et d'Afghanistan. En 20 ans à peine, la région, avantageusement située aux portes de l'Europe, est devenue son grenier à kif, plaçant le Maroc parmi les principaux producteurs et exportateurs de haschisch dans le monde. Dans son dernier rapport publié en 2020, l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), a indiqué que le Maroc continue d'être le «premier producteur de cannabis dans le monde, avec 47500 hectares de culture de cette substance, en 2018... Toujours selon l'Onudc, le Maroc est placé au cinquième rang des cas de saisies de résine de cannabis opérées à travers le monde au cours de la période 2014-2018. Les régions pauvres du Rif, chaîne montagneuse qui s'étend sur 500 km entre Tanger et le fleuve Moulouya, cultivent le kif, en profitant d'une tolérance ancienne, qui remonte au XIXe siècle et au sultan Moulay Hassan 1er, rappelle le magazine français. Cependant, Abdelatif Adebibe, dirigeant de la Confédération des associations de Sanhadja du Rif, accuse ceux qui contrôlent ce secteur lesquels viennent d'autres régions du pays et de l'étranger, et financent des gens d'ici. «Ils restent cachés, mais profitent de l'argent généré par cette culture». Khalid Tinasti, directeur de la Commission mondiale sur la politique des drogues, explique que «la production n'est plus entre les mains de petits cultivateurs, mais aux mains d'investisseurs internationaux aux capitaux illicites, qui blanchissent leur argent directement au Maroc, tout en maîtrisant toute la chaîne de production, jusqu'au trafic vers l'Europe». Le Conseil du gouvernement marocain a validé, en mars dernier, le projet de loi légalisant l'usage du cannabis à des fins thérapeutiques!