Les passagers du train Alger-El Affroun sont unanimes: il n'y a aucune sécurité. En raison des retards et du nombre très réduit de trains destinés à cette ligne, la bousculade est en train de faire le lit du banditisme. Hier, à l'entrée d'El Harrach, un passager a été pris à partie par des badauds. Au premier abord, l'un d'eux l'a bousculé en l'accusant de tentative de vol. Mais le passager a gardé son calme en souriant. Heureusement pour lui, il n'est pas entré dans leur jeu. Il a déjà vécu une histoire similaire, il y a quelques semaines, lorsque deux vagabonds l'ont agressé pour le délester de son téléphone portable, sans que personne n'ait réagi pour lui porter secours. Depuis, il évite de répondre à la provocation. Mais les principales victimes restent les filles, principalement les étudiantes qui voyagent seules et qui prendraient le risque de s'attarder au-delà de 18 heures. Elles sont systématiquement prises à partie et violentées par quelque groupe de badauds qui, à défaut de se défouler dans les stades -fermés en temps de pandémie- prennent le train pour passer le temps, sans payer le ticket de transport. Des scènes similaires se reproduisent tous les jours, sans que les agents chargés de la sécurité n'interviennent. Cependant, ils interviennent des fois au niveau d'El Harrach ou de la gare de l'Agha, par excès de zèle seulement. Hormis l'insécurité qui n'épargne, ni passagers, ni convoyeurs, ni mécaniciens, la majorité des gares de banlieue n'a pas de toilettes publiques ni d'éclairage et est inondée par les ordures, comme c'est le cas d'El Harrach qui représente la porte d'entrée de la capitale. Les places assises sont occupées par les badauds qui ne les cèdent ni aux vieilles personnes ni aux femmes enceintes. En sus, le train démarre dès la matinée sale, avec les ordures de la veille, ce qui suppose qu'il n'est pas entretenu au quotidien. S'agissant des réservations, on est encore à la méthode classique, c'est-à-dire à l'achat aux guichets ou au recours à une carte propre à la Sntf. Il y a bien sûr un site Usagers-train où l'on lit les réclamations des retards ou des images d'un gâchis où certains déchirent à coups de couteau les sièges et brisent les plafonds, pour le simple plaisir de détruire. Mais la véritable saignée du train de banlieue se situe dans les retards injustifiés qui créent une pagaille indescriptible au quotidien, en sus des grèves non annoncées pour la moindre escarmouche. Lorsque l'usager du train sort de chez lui le matin, il n'est pas sûr d'arriver à bon port, parce qu'il ne sait pas s'il y a grève ou pas ce jour-là. Il doit mettre quelque argent dans sa poche pour prendre un taxi ou un clandestin pour rejoindre son lieu de travail. Cette situation a beaucoup duré. Elle ne constitue pas un secret d'Etat, elle se répète tous les jours, avec un relâchement exagéré, au point où l'on se demande si on a un brin de lucidité, en laissant nos filles prendre le train de banlieue.