Le nouveau gouvernement tunisien conduit par Mme Najla Bouden a entamé son action pour relancer une économie particulièrement éprouvée par des années de crise aggravée par la pandémie de Covid-19. L'année 2020 aura été particulièrement éprouvante pour les ménages et c'est face à la montée de la grogne sociale et pour dénouer une impasse politique grave que le président Kaïs Saïed a dû se résoudre à prendre des mesures exceptionnelles, le 25 juillet dernier, limogeant le Premier ministre Hichem Mechichi et gelant les activités d'un Parlement devenu une institution de blocage, selon ses nombreux détracteurs. Pour pallier le déficit dont souffre le budget du pays, la Tunisie est actuellement en négociation avec l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis qui seraient disposés à renflouer les caisses de l'Etat, dramatiquement épuisées par deux années de double crise économique et politique. C'est du moins ce qu'a laissé entendre un responsable de la Banque centrale, repris par des médias locaux. Intervenant sur Mosaïque FM et Shems FM, deux radios privées à l'audience appréciable, le chargé des financements et paiements extérieurs à la Banque de Tunisie, Abdelkrim Lassoued a évoqué «des discussions avancées» avec Riyadh et Abu Dhabi «pour renflouer les ressources de l'Etat». Initialement, la Tunisie devait plaider en ce sens auprès du FMI pour obtenir un nouveau prêt, avec le soutien assuré des Etats-Unis et de la France, mais les pays occidentaux ont opéré un rétropédalage au lendemain des mesures prises par le chef de l'Etat, en juillet dernier, et en écho aux violentes critiques et accusations sur une prétendue «dictature» installée à Carthage, des griefs exprimés à la fois par la formation Ennahdha de Rached Ghannouchi, président de l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP), le Parlement tunisien gelé par Kaïs Saïed, et par l'ancien président provisoire Moncef Marzouki, basé à Paris. L'un comme l'autre appartiennent à la mouvance des Frères musulmans et sont, de ce fait, proches de la Turquie et du Qatar, auquel cas il y a fort à parier que les Emirats se feront une joie de donner satisfaction aux autorités tunisiennes avec, à leur tête, le président Kaïs Saïed, farouchement hostile à Rached Ghannouchi auquel il reproche d'avoir conduit la Tunisie dans l'impasse actuelle, à force de blocages et de compromissions partisanes et politiques. Le responsable de la Banque centrale tunisienne n'a pas indiqué le montant de l'aide financière que la Tunisie négocie avec l'Arabie saoudite et les Emirats pas plus qu'il n'en a précisé la forme mais il a laissé entendre que les discussions seraient déjà parvenues à un stade avancé. Il faut dire que la crise économique du pays, dont la croissance est en berne depuis une décennie (- 0,6% en moyenne par an) alors que l'inflation atteint les 6% chaque année, a atteint des proportions alarmantes, qu'ont illustrées les nombreuses, et parfois violentes, manifestations d'une population frappée de plein fouet par la pandémie de Covid-19, entre janvier et juillet dernier. En outre, la Tunisie est privée des recettes touristiques qui constituent un des leviers majeurs de son économie, depuis le début de la crise sanitaire.