Une fois rentré dans les routes à grande circulation, d'où qu'on vienne, d'est ou d'ouest, du nord ou du sud et vice versa, le cauchemar est le même, y compris dans les petits villages. Le déplacement en véhicule est devenu infernal. Alger, la métropole, a ses particularités dans cette anarchie. Elle se distingue des autres villes par le flux insupportable des automobilistes. Mais regardez bien autour de vous; dans tous les véhicules qui circulent, il y a au plus deux passagers; c'est-à-dire que le véhicule est devenu le principal moyen de locomotion pour aller au travail ou pour amener ses enfants à l'école. Prenez tous les axes, de sortie ou d'entrée, ils sont tous bloqués dès 7 heures du matin jusqu'à 19 heures, sauf les jours fériés. Que l'on vienne de Zéralda, Blida, Boumerdès, de Bordj El Kiffan ou de Draria, le spectacle est le même; les automobiles circulent en première et en seconde vitesse, pendant des heures et des heures puis, de temps à autre, un chauffard forcené tente de bifurquer, en vous coupant la voie. Et l'on se met dans tous ses états, avec les insultes qui fusent de partout. On se dit parfois que la manière de conduire est révélatrice du sens de la citoyenneté ou du civisme. Mais que dira-t-on quand la majorité, agacée par les bouchons, se met à vociférer sans raison? À vrai dire, nos villes ne sont pas conçues pour absorber tous ces milliers de véhicules qu'on n'a pas fabriqués. Quelle serait la situation si on se mettait à les produire ou à les monter en quantité, ici-même? Dans toutes les grandes métropoles, la circulation est plus fluide, parce que les gens ne prennent pas tous les jours leurs véhicules pour aller travailler, il y a les moyens de transport appropriés comme le train, métro, tramway, autobus et même des téléphériques pour les reliefs escarpés comme c'est le cas à Alger. Il y a, certes, eu des réflexions louables pour rendre les villes plus fluides. On se souvient du projet du métro lancé par feu Chadli Bendjedid au début des années 80 et qui fut abandonné, en raison de la crise due à la chute du prix de pétrole en 1986, suivie par une stagnation pendant la décennie rouge, et qui ne fut repris qu'en début du nouveau siècle, en réalisant une seule ligne: Grande- Poste -El Harrach et une bifurcation vers Aïn Naâdja; la principale ligne qui dessert Bab Ezzouar- Aéroport est en phase de finalisation. Du côté nord d'Alger, vers Zéralda, ni l'idée de métro ni de tramway ne sont envisagées ou du moins évoquées. S'agissant du tramway, il y a la seule ligne Bordj El Kiffan -Ruisseau, cependant, très insuffisante. Mais là où le bât blesse, c'est du côté de la Sncf. Les trains de banlieue circulent au gré des vents et du beau temps. Je crois qu'on est le seul pays au monde où le train circule quand il veut. Prenons l'axe Alger-Blida, cette ligne est mal desservie, en raison d'abord du nombre de trains très insuffisant et des retards qui sont devenus coutume, puis le ralentissement au niveau de Baba Ali, pour attendre chaque fois le passage du train qui vient en sens inverse. Sur les quais, la foule progresse au fil des heures à cause des retards et quand arrive le train, les gens se jettent les uns sur les autres, en laissant les femmes désemparées, parce qu'elles n'ont ni la force ni l'audace de bousculer les autres passagers. Côté Réghaïa- Boumerdès, c'est pareil, mais le nombre de trains mis sur voie est plus important. Il n'y a que l'axe Alger- Zéralda qui marche parce que les gens évitent de faire le tour du monde pour se rendre chez eux. Côté routier, c'est-à-dire le recours au transport classique par autobus, c'est un autre trou noir. Il est pris majoritairement par des privés, très peu soucieux du confort des passagers et du respect du Code de la route. C'est une anarchie bien réelle. Cet espace mérite une attention particulière des autorités pour y mettre de l'ordre. Il y a enfin l'état des routes qui ne sont pas faites pour drainer ce nombre impressionnant de véhicules au quotidien. Il faudra là aussi réfléchir à la manière de rendre les routes plus fluides par le recours à d'autres voies s'il le faut, même en ouvrant une ligne au-dessus de la baie d'Alger ou le recours aux souterrains et ponts suspendus. Le problème du transport public, dans les grandes villes en particulier, mérite une politique à part. Il faut s'y mettre tout de suite parce que l'agglomération est appelée à évoluer, même si la disparition des ghettos a donné un bol d'air.