C'est un peu l'histoire qui se répète à l'université de Béjaïa. Comme lors de l'ouverture du campus d'Amizour, la problématique cyclique d'occupation des nouveaux campus revient de nouveau cette année à la faveur de l'ouverture du campus d'El-Kseur. Et c'est de nouveau le bras de fer entre les enseignants et le rectorat. La décision prise par la direction de l'université d'affecter les étudiants de 1ère année de certaines filières vers ce nouveau campus d'El Kseur n'est pas du goût des enseignants du département des 1ères années technologie, de la faculté de technologie, ceux de la faculté des sciences de la nature et de la vie et enfin de la faculté des sciences exactes. Ces derniers, officiant dans 3 facultés du campus de Targa Ouzemmour de l'université Abderrahmane Mira de Béjaïa, ont exprimé leur refus «d'isoler les seules 1ères années au campus d'El Kseur» et condamnent «une décision unilatérale et sans aucune référence dans aucun des organes de décision de l'université de Béjaïa. L'administration, pour sa part, affirme que cette décision s'est appuyée sur une large consultation auprès de «tous les enseignants de l'ensemble de l'université», ce qui a conduit à la prise de cette décision pour que les cours se déroulent normalement dans ce nouveau campus, pris en charge, selon les contestataires, par des contractuels, qui ne peuvent, de par leur statut, rejoindre les opposants. Genèse du conflit Le 18 mai 2009, la commission d'arbitrage du ministère des Finances retient la proposition de projet de développement de l'université de Béjaïa dans le cadre du programme 2010-2014, qui contient, entre autres «l'étude et la réalisation d'une faculté de droit de 8000 places pédagogiques au campus d'Amizour» et «l'étude et la réalisation d'une faculté des sciences économiques, des sciences de gestion et des sciences commerciales, de 10000 places pédagogiques au campus d' El Kseur» Les retards sur ces chantiers ont exigé l'intervention énergique des élus de l'APW, notamment en juillet 2013. Une année plus tard, le recteur déclare, déjà, dans la presse, que la Dlep peine à livrer, certaines structures nécessitant «une expertise des différents réseaux réalisés et reprise de malfaçons». Pourtant, au Conseil scientifique de l'université du 30 juin 2014, le recteur déclare réceptionner plusieurs milliers de places pédagogiques dans les deux campus, sur la période 2014 à 2016. Ce rappel est nécessaire, puisque lors de la réunion des représentants des enseignants, le recteur a justifié la non-occupation de la faculté d'économie de son campus par le fait du manque de places pédagogiques. On serait très loin des chiffres annoncés. À la rentrée 2015, l'administration décide, de manière unilatérale, d'attribuer le campus d'Amizour, tour à tour à la faculté des sciences humaines du campus d'Aboudaou, puis à «l'Institut de langue et culture amazighes», avant de s'acharner sur la faculté des sciences exactes du campus de Targa Ouzemmour, pour y installer, en 2019, une école d'informatique, alors que l'université de Béjaïa dispose déjà de 2 filières en informatique: une filière normale et une filière à recrutement national. C'est comme l'histoire de l'occupation du campus d'Amizour, Présentement, s'est invitée celle du campus d'El Kseur. En mars 2021, le rectorat a envoyé une «fiche de consultation» à tous les enseignants, mais en précisant dans son en-tête: «au profit du campus Targa Ouzemmour», alors que le campus était initialement destiné à la faculté des sciences économiques, selon les protestataires. Un doyen a d'ailleurs tenu des propos très graves, en affirmant que les intitulés ont juste été faits pour «avoir l'argent», et cela en présence du recteur et des délégués des enseignants lors de la réunion du 10/10/2021, ajoute un enseignant. Commence alors le bras de fer Dès la rentrée, les enseignants ont menacé de suspendre les activités pédagogiques et une semaine après, l'administration fait la sourde oreille; quant à la grogne des enseignants du département des 1ères années technologie de la Faculté de technologie, qui sont entre- temps passés à l'acte et ont été rejoints, cette semaine, par leurs collègues de la Faculté des sciences de la nature et de la vie.Ils exigent l'annulation pure et simple de cette décision et proposent l'ouverture d'un débat impliquant toute les facultés et les différents représentants de la communauté universitaire pour que la question de l'occupation des 2 campus d'Amizour et d'El Kseur soit définitivement réglée. Les enseignants ont proposé divers scénarios pour l'occupation des sites et dans tous les cas de figure, dès à présent délocaliser d'abord les vice-rectorats dans chaque campus, et dès le 2e semestre 2021-2022, délocaliser les administrations des départements que le débat aura convenu de transférer aux campus d'Amizour et d'El-Kseur. Depuis, rien n'est venu éclairer un tant soit peu cette situation conflictuelle. D'une part, l'administration semble s'y plaire, affirmant que «tout va bien» et d'autre part, les enseignants persistent dans leur mouvement. L'université de Béjaïa, qui compte plus de 45000 étudiants, nécessite réellement et en urgence une restructuration en 2 universités. Une idée déjà évoquée mais sans suite, sans compter les problèmes qui ressurgissent, chaque année, comme une ritournelle propre à Béjaïa.