Une affaire abracadabrante Une commission ministérielle se trouve sur place depuis avant-hier pour d'abord faire le constat des lieux et discuter avec les deux parties en conflit avec au bout un rapport au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Le bras de fer engagé depuis le début de l'année universitaire entre d'un côté, l'administration rectorale de l'université Abderrahmane-Mira de Béjaïa et de l'autre, les enseignants soutenus par les étudiants tourne en faveur de ces derniers. Sur instruction du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique le transfert de la faculté des sciences exactes vers le pôle universitaire d'Amizour, fraîchement inauguré, vient d'être gelé. Une commission ministérielle se trouve sur place depuis avant-hier pour d'abord faire le constat des lieux et discuter avec les deux parties en conflit avec au bout un rapport au ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Le gel est-il provisoire? Le transfert sera-t-il annulé? A qui le tour? Autant de questions que tous les personnels de l'université et les étudiants se posent. Toujours est-il que ce conflit qui remonte au mois d'avril dernier, n'est pas tout à fait réglé et l'angoisse demeure pour toucher toutes les facultés du campus de Targa Ouzemour car dans le cas où le transfert de la faculté des sciences exactes est annulé, ça sera une autre faculté qui sera concernée. L'inquiétude gagne les étudiants Retour sur la chronologie de ce bras de fer. En avril 2015, d'une manière informelle, certains proches du recteur informaient les travailleurs et les enseignants de la faculté des sciences exactes de leur départ vers le nouveau campus d'Amizour, raconte M. Touazi. Le 27 juillet 2015, le recteur a validé cette décision. Les enseignants de quatre départements de la faculté des sciences exactes se sont réunis avant le conseil de direction du 27 juillet 2015, à l'unanimité, ils ont affirmé que, pour des raisons pédagogiques et scientifiques, la délocalisation de la faculté des sciences exactes n'a de sens que de casser son développement. A la veille des grandes vacances d'été, le recteur annonce la délocalisation. Le campus d'Amizour est conçu et réalisé avec des infrastructures appropriées, depuis 2008 à fin juillet 2015, pour la faculté de droit et des sciences politiques dont le recteur était doyen, en ce moment, est partie prenante de la cette décision qu'il a cautionnée. Suite au refus de la faculté concernée, le recteur se rabat vers la faculté des sciences sociales sans pour autant informer aucun responsable de cette faculté, ni demander son avis avant sa prise de décision unilatérale. A la veille de l'Aïd El Adha, le recteur a déplacé tous les dossiers et les documents administratifs et pédagogiques de la faculté vers le campus Amizour, fait rejoint de force les travailleurs ATS après l'Aïd, alors que même ce campus n'est pas achevé, ni réceptionné et des engins opéraient encore à l'intérieur. La faculté des sciences exactes compte un peu plus de 4000 étudiants en graduation et 408 doctorants, parmi eux des enseignants permanents. Le nombre de post-graduants dépasse tous ceux des autres facultés, même les plus grandes. A elle seule, cette faculté possède six laboratoires de recherche et une unité de recherche. La production scientifique de la faculté des sciences exactes, à elle seule, dépasse celle de toute l'université. Les enseignants relèvent certaines contradictions liées à la délocalisation de cette faculté. Dans le monde, aucun responsable n'osera dissocier une faculté de sciences avec celle de technologie. Et pour preuve, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a inauguré le mois dernier l'académie des sciences et de technologie d'Algérie. Autres exemples l'Usthb d'Alger, l'Usto d'Oran. Les équipements pédagogiques et scientifiques sont inexistants encore, aucune infrastructure de laboratoire n'existe, ni n'est prévue au campus d'Amizour. Comment prendre en charge la pédagogie et la recherche? A Targa Ouzemmour, les gestionnaires affirment disposer de toutes les infrastructures au complet (inscrites au nom des sciences exactes), des laboratoires et des équipements, en plus de ceux qui sont partagés avec la faculté de technologie. Côté Administration, l'initiative est justifiée. S'appuyant sur le nombre des étudiants, le choix est vite porté sur la faculté des sciences exactes. Pour le rectorat, c'est elle qui répond le plus à l'exigence de l'heure. Le recteur de l'université avait déclaré que la décision de la délocalisation de la faculté des sciences exactes du campus de Targa-Ouzemour vers celui d'Amizour est irrévocable. Rencontré, avant-hier à Amizour, lors de la visite d'inspection du wali concernant l'état d'avancement des travaux de réalisation de ce même campus, Boualem Saidani, recteur de l'université de Béjaïa nous a affirmé que les délais de réalisation seront respectés, et que la plupart des équipements allaient être livrés d'ici la fin de semaine. D'ailleurs, plusieurs blocs ont déjà été réceptionnés, comme les amphis et les bureaux, et l'installation matérielle avait déjà commencé. Malgré les apparences, le chantier avance à un rythme soutenu. L'électricité a été installée, la fibre optique, l'eau, les évacuations, la clôture, ainsi que le gaz qui va être opérationnel. Le campus d'Amizour est non encore prêt et réceptionné. A 3 km du village d'Amizour et à 25 km de la ville de Béjaïa, aucune infrastructure sociale n'existe autour du campus. La route vers ce campus, surtout au départ de Béjaïa, est tout le temps congestionnée, même en temps normal. Elle est très étroite, pleine de virages. Que deviendra-t-elle avec le flux qui sera causé avec la communauté universitaire de plus de 4000 âmes en perpétuel déplacement. Pourquoi ne pas utiliser les infrastructures existantes à Aboudaou; laisser les travaux s'achever convenablement dans ce campus, le réceptionner correctement? Entre-temps l'axe autoroutier vers ce campus pourra s'ouvrir puis bien réfléchir pour l'usage correct et rationnel de celui-ci. A Targa Ouzemmour, il n'y a pas le feu, on peut encore fonctionner correctement. Le recteur a surestimé les effectifs d'étudiants annoncés et a sous-estimé les places pédagogiques (une chaise n'est pas une place pédagogique et certains créneaux des samedis et de 16h à 18h ne sont pas utilisés). Et pourtant, des solutions existent... Le recteur n'a pas comptabilisé les places pédagogiques de certains laboratoires, notamment celle du centre de calcul (plus de 600 chaises) et a ajouté l'effectif de la faculté de médecine qui est installée à Aboudaou. Dans ce bras de fer, les étudiants ne sont pas restés en marge. Ils se sont d'abord ralliés aux enseignants procédant même à des actions de protestation. Hier l'angoisse était de mise. Que décidera la commission? En cas de gel quelle sera la faculté qui sera transférée? Ses étudiants accepteront-ils de rejoindre Amizour? S'achemine-t-on vers un autre bras de fer à l'image de celui qui connaît provisoirement son épilogue. Des questions qui minent les esprits de la communauté universitaire de Béjaïa, habituées depuis toujours aux situations de tension interminable.