Aucun chef du gouvernement sortant n'a eu une discussion aussi longue avec le chef de l'Etat. La démission de Ahmed Ouyahia a été officiellement accepté hier, à l'issue d'une audience qu'il a eue avec le président de la République. Déjà dans l'air depuis plusieurs jours, le départ d'Ouyahia du gouvernement était quasi certain depuis avant-hier. En effet, l'entourage proche de l'ancien chef de l'Exécutif avait déclaré à L'Expression que Ahmed Ouyahia avait très mal pris la campagne qui l'a ciblé récemment. Les mêmes sources nous avaient également indiqué la détermination de l'ex-chef du gouvernement de quitter définitivement la vie politique. Seulement un détail, et pas des moindres, est intervenu hier. En effet, l'entretien Bouteflika-Ouyahia a duré trois heures et demie, ce qui renseigne sur l'importance du tête-à-tête. Aucun chef de gouvernement sortant n'a eu une discussion aussi longue avec le chef de l'Etat. L'on peut donc supposer que le président de la République et son ancien responsable de l'Exécutif ont abordé en profondeur des questions d'intérêt national. L'on peut aussi supposer que les deux hommes, étant déjà sur la même longueur d'onde sur de nombreux dossiers, ont évoqué l'avenir politique immédiat de Ahmed Ouyahia. L'on n'évacue donc pas la possibilité que le président de la République ait voulu garder Ouyahia auprès de lui, en lui proposant un poste dans le nouveau gouvernement. Une option vraisemblable, sachant les qualités avérées du secrétaire général du RND. Quant à savoir si l'ex-chef du gouvernement a favorablement reçu les arguments du président, il est encore trop tôt pour le dire, mais lorsqu'on sait la force de persuasion du chef de l'Etat, la probabilité de voir Ouyahia à la tête d'un département ministériel est de mise. Diplomate rompu, l'ancien responsable de l'Exécutif est sans doute le mieux placé dans la conjoncture actuelle, pour prendre les Affaires étrangères, soutiennent des observateurs avertis de la scène politique nationale. En fait, la possibilité que Ouyahia prenne un portefeuille est probable du fait de sa déclaration au sortir de l'audience avec le président de la République, il a en effet réaffirmé son «soutien total pour la politique qu'il (le président de la République Ndlr) a imprimée notamment au sujet de la réconciliation nationale, du renforcement de la sécurité et de l'édification économique». Une déclaration, loin de sonner comme un divorce, témoigne d'une position constante dans le discours de l'ancien chef du gouvernement. Il est séant de remarquer, à ce propos, que de tous les chefs de gouvernement sous Bouteflika, seul Ouyahia a eu une attitude responsable et respectueuse des institutions de la République. Il faut reconnaître à l'homme cette qualité, assez rare, dans les moeurs politiques algériennes. Il a dirigé trois gouvernements et à chaque fin de mission, il n'a aucun moment, insulté l'avenir. «Mis entre parenthèses, à plusieurs reprise Ouyahia a toujours su rebondir», souligne un proche de son entourage.