Finalement, il n'en faut pas beaucoup pour se faire des millions. Le démantèlement de ce réseau l'a prouvé. A partir d'un matériel informatique très rudimentaire, cinq jeunes informaticiens se sont constitué une petite fortune et s'apprêtaient à fabriquer des billets étrangers, des dirhams marocains et des dinars libyens. L'enquête préliminaire déclenchée par la brigade de gendarmerie de Khemis El-Khechna, suite à des informations relatives à la circulation de faux billets de banque, avait permis l'arrestation de la tête pensante du groupe. Ses acolytes, disséminés entre Larbaâ, Sidi Moussa et Hammadi, furent, dans les jours qui ont suivi, tous arrêtés chez eux, inculpés et mis sous contrôle judiciaire, en attendant leur condamnation par le juge instructeur du tribunal de Rouiba. Ce groupe, qui sévissait dans la périphérie ouest de la wilaya de Boumerdès, avait «monté son affaire» en investissant, d'abord, dans le matériel informatique. Un micro-ordinateur à scanner incorporé, une imprimante Epson, du papier A4 et de bons informaticiens ont suffi pour lancer leur opération.Dans un premier temps, furent fabriqués 417 billets de 500 DA et 127 de 200 DA. D'autres billets de banque de 200 DA étaient en voie de «finalisation» (impression d'une seule face). Des dirhams marocains et des dinars libyens étaient aussi en voie de fabrication. Exposés par la brigade de Ouled Heddadj, ces billets étaient plus réels que les réels, malgré un papier qui, après un coup d'oeil attentif, se révèle de piètre qualité pour tromper un homme avisé. Mais tout le monde n'est pas connaisseur en matière de faux billets, et plusieurs ont été écoulés sans que personne trouve à redire. Plus de vingt CD ont été saisis en plus d'une quantité importante de disquettes, toutes programmées sur un logiciel adéquat qui permettait de cadrer, copier et imprimer la fausse monnaie. Les cinq comparses, qui avaient tous suivi des formations en informatique, manipulent cet outil avec la dextérité qu'il faut pour se lancer dans cette entreprise juteuse. Chevauchant sur plusieurs wilayas Blida, Boumerdès et Alger ils étaient en pleine expansion pour constituer un des groupes les plus performants du Centre. L'enquête préliminaire a abouti à leur arrestation, d'abord, avant qu'ils ne soient inculpés par le procureur de la République. Cette affaire, qui a rompu la monotonie des environs de Ouled Heddadj, fait suite à la longue liste des affaires liées à la fausse monnaie. Ce phénomène, qui a pris de l'expansion depuis cinq ans grâce à la prolifération et à la disponibilité bon marché des techniques informatiques et d'impression, prend aujourd'hui des proportions quasi alarmantes. Entre janvier 2000 et décembre 2001, au moins 500 affaires liées à la fausse monnaie ont été saisies par les tribunaux et les services de police et de gendarmerie compétents. Le chômage et l'esprit en effervescence des jeunes aidant, la prolifération des groupes de faux-monnayeurs risque d'être un autre défi qui se posera aux services de sécurité dans les années à venir. L'informatique et la fausse monnaie est réellement un couple explosif.