Une nouvelle stratégie industrielle serait à l'étude en vase clos. Abdelhamid Temmar ne pouvait pas rater un forum comme la Foire internationale d'Alger sans organiser une rencontre avec la presse autour de sujets aussi importants que ceux des privatisations et de la nouvelle vision industrielle du pays. M.Temmar n'est-il pas connu pour ses prêches enflammés sur l'économie de marché. En matière de marketing, on ne peut pas, effectivement, trouver mieux, même si en termes de réalisation, les choses ne sont pas aussi brillantes qu'on nous l'a toujours affirmé, la réforme battant de l'aile plus souvent qu'à son tour. Cela dit, le ministère de la Participation a toujours été un laboratoire. La rampe de lancement pour de nouvelles idées. Sa principale mission, à la fin des années 90 et début des années 2000, fut d'abord de faire la promotion de l'économie de marché, en jurant que «dans six mois, le paysage économique aura changé». En réalité, la réforme a été plus difficile à mettre en oeuvre. Et puis il n'y pas eu beaucoup de changement. Le pays a fait du surplace. Aujourd'hui Abdelhamid Temmar revient, comme il se doit à la Foire d'Alger, nous informer que le gouvernement s'apprête à lancer une nouvelle stratégie économique. Nous, on veut bien le croire, mais on lui fera remarquer que ce serait donc une énième nouvelle stratégie. Y-a-t-il quelqu'un d'assez éclairé dans la salle pour nous dire quand nous devons considérer qu'une vraie nouvelle stratégie est bien mise en oeuvre? Nouveauté des nouveautés annoncées par Abdelhamid Temmar: les investisseurs dont les dossiers ont été rejetés par l'Andi pourront introduire des recours auprès de...l'Andi. Déjà, l'annonce de la création de l'Andi, elle-même, fut présentée comme une nouveauté, une révolution dans l'art de traiter les dossiers d'investissement, avec toute une série de facilitations et d'incitations accordées aux opérateurs économiques. Sans doute que ces recours aideront à une meilleure compréhension entre les pouvoirs publics et les opérateurs, pourquoi pas? Cela allongera un peu les délais, mais aura au moins le mérite de la clarification. Reste maintenant la philosophie entourant la privatisation, opération qui semble en bonne voie, si on part du fait que près de 300 privatisations ont été réussies depuis juin 2005. Soit depuis environ une année. Or il semble que dans ce domaine, on a péché un peu par précipitation, sans définir réellement les règles du jeu, tant il semble évident qu'on ne peut réussir une opération d'une telle envergure si on ne la couple pas avec une vision industrielle cohérente. D'un côté, la privatisation sera effective le jour où le secteur économique privé sera fort économiquement, financièrement et politiquement, c'est-à-dire le jour où le secteur privé économique sera dominant dans le pays, où les patrons auront assez de ressources en capitaux et de ressources financières pour se lancer dans de vastes projets, et où bien entendu leur politique sera portée par un gouvernement acquis aux idées de l'économie de marché. Et, last but not least, tout cela ne sera possible que si l'environnement bancaire et administratif sera assaini. Ce qui, on l'aura compris, n'est pas encore le cas. La privatisation est aussi affaire de lobbying. Y-t-il des lobbies assez puissants en Algérie pour porter une politique de privatisation, non seulement au plan du marketing, mais aussi en y mettant les moyens qu'il faut et selon une vision qui prenne en compte les intérêts du pays? Ce qu'on remarque en tout cas, c'est qu'il y a beaucoup de gaspillage. Le système mis en place en Algérie au cours des années soixante et soixante-dix n' arrive ni à se régénérer ni à faire sa mutation. Tout ce qu'on peut espérer aujourd'hui, c'est que la nouvelle vision industrielle du pays ne se fasse pas en vase clos, dans l'opacité la plus totale, mais en faisant participer tous les experts et les opérateurs.