Le Kremlin a jugé, hier, «prématurée» la tenue d'un sommet entre Vladimir Poutine et Joe Biden, douchant les espoirs suscités par l'annonce française de la veille sur une telle rencontre visant à désamorcer le danger d'une invasion russe de l'Ukraine. Annoncé dans la nuit de dimanche à lundi par la Présidence française, l'accord de principe sur un tel sommet visait à faire baisser les tensions à leur comble autour de l'Ukraine, les combats dans l'est du pays entre l'armée et des séparatistes pro russes s'étant aggravés ces trois derniers jours. La Russie est accusée d'avoir massé environ 150.000 troupes aux frontières ukrainiennes en vue d'une invasion que les Occidentaux présentent depuis des semaines comme imminente. La crainte est que Moscou puisse se servir d'une escalade dans l'Est ukrainien pour envahir son voisin pro-occidental. «Il y a une entente sur le fait de devoir continuer le dialogue au niveau des ministres (des Affaires étrangères). Parler de plans concrets d'organisation de sommets est prématuré», a tranché lundi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Selon lui, une rencontre est possible si Poutine et Biden le jugent «utile», mais ces derniers peuvent toujours se parler «au téléphone ou d'une autre manière». Après une journée de diplomatie téléphonique d'Emmanuel Macron, la présidence française avait annoncé dans la nuit de dimanche à lundi que Biden et Poutine avaient chacun «accepté le principe d'un tel sommet», précisant que ces pourparlers seraient ensuite élargis à «toutes les parties prenantes» à la crise ukrainienne. Le président français a parlé deux fois au président russe dimanche et à eu une reprise avec le dirigeant américain. Une rencontre des chefs des diplomaties russe et américaine, Sergueï Lavrov et Antony Blinken, est par ailleurs prévue jeudi. Paris comme Washington ont aussi insisté sur le fait qu'un sommet ne pourrait se tenir que si la Russie n'envahit pas l'Ukraine. Or, selon les Occidentaux, les combats actuels dans l'Est pourraient servir de prétexte à Moscou pour attaquer son voisin. Vladimir Poutine devait présider, hier, à la mi-journée une réunion de son Conseil de sécurité, puissant organisme qui regroupe les principaux décideurs russes, notamment les dirigeants de l'armée et des services de renseignements. Sur le terrain, hier, dans l'est de l'Ukraine, les affrontements se poursuivaient, Kiev faisant état de 14 bombardements des rebelles pro russes, qui ont blessé un soldat. Les séparatistes ont rapporté la mort de trois civils dans les bombardements, ces dernières 24 heures, ainsi que l'explosion d'un dépôt de munitions dans la région de Novoazovsk, accusant des «saboteurs ukrainiens» d'en être responsables. Ces informations n'ont cependant pas pu être vérifiées de manière indépendante. Les autorités des deux républiques pro russes autoproclamées de l'Est de l'Ukraine ont ordonné la mobilisation des hommes en état de combattre et l'évacuation des civils vers la Russie. Moscou a rapporté, hier, que 61.000 personnes avaient été évacuées de la zone.»Ils nous bombardent, font peur aux enfants. Ils nous survolent (...) nous avons entendu des choses voler, frapper, exploser, s'allumer», a raconté l'une des personnes évacuées, Lioudmila Kliouiko, retraitée de 56 ans, à son arrivée à Taganrog en Russie. Le Kremlin a souligné, hier, une nouvelle fois que la «situation reste extrêmement tendue» sur le front de l'Est ukrainien, disant être «inquiet». Moscou et Kiev se sont mutuellement accusés dimanche d'être responsables de cette flambée de violences dans un conflit qui a fait plus de 14.000 morts depuis son déclenchement en 2014, dans la foulée de l'annexion de la Crimée ukrainienne par la Russie. Vladimir Poutine comme son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky ont appelé à intensifier les efforts diplomatique en vue de la restauration d'un cessez-le-feu. Moscou se défend de tout projet d'invasion de l'Ukraine mais réclame la promesse que le pays n'intègrera jamais l'Otan et la fin de l'expansion de l'Alliance à ses frontières, autant de demandes rejetées par les Occidentaux. Les Occidentaux ont menacé Moscou de sanctions dévastatrices en cas d'offensive contre l'Ukraine. «Nous sommes prêts à infliger des conséquences rapides et sévères si la Russie choisit la guerre à la place» de la diplomatie, a encore mis en garde dimanche la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki. «Et actuellement, la Russie semble poursuivre ses préparatifs pour une attaque à grande échelle de l'Ukraine».