Tir groupé, hier, de responsables israéliens qui, à un niveau ou à un autre, ne demandent ni plus ni moins que la tête de Yasser Arafat. A Strasbourg, s'adressant au Conseil de l'Europe, le ministre israélien des Affaires étrangères, Shimon Peres, déclare en substance: «Si (le président) Arafat ne met pas fin à la terreur, la terreur l'arrêtera», laissant la porte ouverte à toutes les supputations. A Tel-Aviv, le conseiller de Sharon, Dany Naveh, affirme de son côté: «Israël, n'a d'autre choix que de mettre fin au régime du président Yasser Arafat» au moment même où le président de la commission parlementaire des affaires étrangères et de la défense, David Maquen, souligne: «Nous espérons qu'une nouvelle direction palestinienne prendra bientôt les commandes, avec laquelle nous pourrons engager le dialogue.» Ce tir groupé de responsables politiques israéliens va dans le même sens: délégitimer le président Arafat et l'Autorité autonome, Israël prétendant de la sorte choisir ses interlocuteurs palestiniens. Car de quelle terreur parle le chef de la diplomatie israélienne lorsque son gouvernement maintient (depuis seize mois) le blocus des territoires palestiniens, qu'Israël occupe depuis plusieurs décennies ; lorsque ce même gouvernement organise la destruction systématique des symboles de l'autonomie palestinienne: quand il fait subir au président de l'Autorité palestinienne l'humiliation de l'assignation à résidence (depuis le 3 décembre de l'an dernier) à Ramallah. Qui pratique la terreur lorsque l'Etat hébreu détruit les infrastructures palestiniennes, élimine, par l'assassinat ciblé, les cadres palestiniens? Tout cela en vue de mater la révolte (Intifadha) du peuple palestinien. Jouissant de l'impunité internationale, du soutien inconditionnel des Etats-Unis, Israël a multiplié les provocations allant jusqu'à se poser comme victime des pierres palestiniennes. Aussi, de quelle terreur qui «arrêtera» Arafat parle Shimon Peres? De celle qu'évoque Dany Naveh qui, tout en indiquant que Arafat «n'est pas un partenaire pour la paix», affirme qu'Israël «n'a d'autre choix» que de «mettre fin au régime» de Arafat? Par l'assassinat du leader palestinien? N'est-ce pas ce qu'entend le président de la commission parlementaire lorsqu'il dit son espoir de voir apparaître «une nouvelle direction palestinienne» avec laquelle (il serait possible?) aux Israéliens d'engager «le dialogue». A l'instar d'autres oppresseurs qui tentèrent de choisir leurs interlocuteurs, Israël veut avoir ses «bons et dociles» Palestiniens avec lesquels négocier. Ainsi, c'est à mots à peine couverts que des responsables politiques israéliens évoquent l'élimination de Arafat et des actuels dirigeants palestiniens sans autrement susciter l'indignation ou la condamnation de la part de la communauté internationale. Communauté qui s'est, par ailleurs, empressée de condamner les actes désespérés de kamikazes palestiniens, mais ne dit mot sur l'opération barbare de destruction des infrastructures de la radio et de la télévision palestiniennes par les chars israéliens. Quand la «communauté» internationale réagit c'est essentiellement pour condamner les attentats palestiniens, ou dans le meilleurs des cas, elle s'efforce de renvoyer dos à dos les agresseurs israéliens et les victimes palestiniennes, prenant soin à ne pas mettre dans l'embarras l'occupant israélien. Ces réactions ne relèvent jamais que la première violence c'est encore la persistance de l'occupation par Israël des territoires palestiniens. Ainsi le Haut représentant de l'UE pour la politique extérieur, Javier Solana, estime la situation au Proche-Orient «très grave» sans pour autant en situer les causes et les responsabilités, lorsqu'il se suffit de déclarer: «La situation actuelle (au Proche-Orient) est très grave et nous devons voir comment sortir de ce cercle de la violence.» Feignant, ainsi, de ne pas savoir qu'il suffit, pour décanter la situation et, à tout le moins situer les responsabilités des uns et des autres, qu'Israël applique les résolutions de l'ONU que Tel-Aviv a toujours refusé de prendre en compte. En faisant pression sur les seuls Palestiniens, la communauté internationale fait fausse route et surtout passe à côté des tenants et aboutissants d'un dossier limpide, entrant dans le contexte de la décolonisation, et demandant une application rigoureuse des résolutions préconisées par le Conseil de sécurité de l'ONU. Tout cela est trop simple pour les Israéliens qui veulent la paix et la terre, tout en accusant les Palestiniens de ne pas remplir leurs obligations. Depuis le début de l'Intifadha, les Palestiniens demandent la mise en place d'une force d'interposition internationale. Le seul obstacle à la paix demeurent Sharon et sa politique agressive envers les Palestiniens.