Le leader de la cause palestinienne, accusé par Tel-Aviv et Washington, de soutenir les extrémistes, n'est nullement disposé à se laisser marginaliser dans le processus de paix. Il s'est vigoureusement défendu dimanche soir sur la chaîne de télévision américaine Fox News, tout en insistant sur l'importance du rôle qui lui revient de droit en tant qu'élu. Ariel Sharon veut une paix à sa mesure où il n'y a pas de place pour Yasser Arafat. Toutes les mesures prises à son encontre par Israël, notamment le siège imposé à son quartier général de la “Moukatâa” pendant de longs mois, sont restées vaines. Le chef du gouvernement israélien ne sait plus quelle décision prendre à son sujet. Pris en étau par les demandes des extrémistes exigeant le départ de Arafat et “l'injonction” de Washington de ne pas lui porter atteinte, Sharon se limite à bloquer le processus de paix. “Il est préférable que Arafat reste coincé dans sa Moukatâa”, a répondu Sharon à ses ministres qui exigeaient l'expulsion du président de l'autorité palestinienne, dimanche, lors du conseil de gouvernement d'urgence tenu après les attentats-suicide de Jérusalem et de Hébron, qui ont fait neuf morts et vingt blessés israéliens. Tout en décidant de boucler la Cisjordanie et la bande de Gaza, comme c'est le cas après chaque attentat-suicide anti-israélien, l'exécutif israélien s'est gardé de prendre des mesures radicales pour, semble-t-il, “ne pas déstabiliser le gouvernement du premier ministre palestinien Mahmoud Abbas” qu'Israël “considère comme un pragmatique modéré”. Toute la responsabilité des attentats est attribuée par le gouvernement israélien à Yasser Arafat, qui l'accuse d'avoir “tracé la voie du sang et du terrorisme”. Le leader de l'OLP, interrogé par la chaîne d'informations américaine Fox News au téléphone, dimanche, s'est indigné au sujet des accusations portées contre lui en demandant “des preuves”. Il s'est déclaré “complètement en accord avec la paix des braves” qu'il a signée, tout en condamnant les derniers attentats suicide. Sur ses relations avec son premier ministre Abou Mazen, il a affirmé qu'il “lui a apporté son soutien à tous les niveaux ainsi qu'à son gouvernement et (qu') il continuerait à le faire”. Il a tenu à dire qu'il n'acceptera jamais l'expulsion, en ajoutant, “n'oubliez pas que j'ai aussi un rôle à jouer car j'ai été élu”, en réponse aux propos du porte-parole du gouvernement israélien, Raanan Gissin, qui avait évoqué le jour même l'éventualité de son départ hors des territoires palestiniens. Le ministre palestinien de l'information, Nabil Châath, a appelé la communauté internationale à “protéger” Yasser Arafat contre de graves menaces israéliennes, à son arrivée dans la nuit de dimanche à lundi au Caire. “Il y a de graves menaces contre le président Arafat, Israël parle de nouveau des éventualités d'envahir son quartier général”, a déclaré Châath à la presse égyptienne, avant d'ajouter qu' “une action est nécessaire pour protéger le président palestinien”, bloqué dans son quartier général à Ramallah (Cisjordanie), depuis décembre 2001 par l'armée israélienne. Selon lui, la rencontre Sharon-Abou Mazen n'a servi qu'à sonder la position israélienne et exposer le point de vue palestinien. En attendant, c'est le statu quo. Israël ne veut pas entendre parler de Yasser Arafat au point de boycotter les officiels étrangers qui le rencontreraient. C'est ce qu'a annoncé officiellement Ariel Sharon à l'issue de son Conseil de gouvernement extraordinaire avant-hier. Cette décision ne s'applique cependant pas aux cinq visites officielles prévues dans les prochaines semaines, dont celle de Dominique de Villepin, le ministre français des affaires étrangères, prévue pour le 26 mai et au cours de laquelle il est censé rencontrer Arafat. Le bras de fer Sharon- Arafat influera inévitablement sur le règlement du conflit israélo-palestinien. Les semaines à venir seront déterminantes. K. A.