Souriant et ému, arborant le «V» de la victoire, Benchicou quitte la prison avec des fleurs et des youyous. Mercredi 14 juin 2004, mercredi 14 juin 2006. Deux ans, jour pour jour, le journaliste Boualem Mohamed Benchicou a été libéré hier, après avoir purgé la totalité de sa lourde peine de deux années d'emprisonnement. Une foule d'environ deux cents personnes attendait impatiemment, depuis 7h du matin, la sortie du journaliste. Rassemblée devant la porte de la prison d'El Harrach, la foule s'impatiente à mesure que les minutes s'égrènent. A 9 heures du matin, le thermomètre affiche déjà 28 degrés à l'ombre, Benchicou n'est pas encore libéré. L'épouse du journaliste, Fatiha Benchicou, des membres du Comité Benchicou pour les libertés (CBL), des représentants du mouvement citoyen de Béjaïa, de Boumerdès, de Bouira et de Tizi-Ouzou composaient cette foule, à côté des nombreux journalistes de la presse nationale et étrangère venus couvrir cette libération. Etaient présents également à ce «rassemblement devant la prison» des personnalités dont l'avocat Ali Yahia Abdennour, le commandant Azzedine et Abdelhak Brerhi. A 10 heures tapantes, la foule explose de joie. Mohammed Benchicou est libre! Souriant et ému, la main droite levée au ciel arborant le «V» de la victoire, Benchicou quitte la prison avec des youyous et des bouquets de fleurs. Après deux années de geôle, il rejoint sa famille, ses confrères, ses amis et ses compagnons. A l'apparition de M.Benchicou bien portant, s'ensuivit une indescriptible bousculade entre les photographes, les journalistes et des citoyens voulant approcher M.Benchicou. C'est le désordre total devant la porte de la prison alors que retentissaient les slogans chers au mouvement citoyen: «Ulac s'mah Ulac» ( pas d'impunité Ndlr ), «pouvoir assassin»...Les policiers ont eu tout le mal du monde à frayer un chemin pour la voiture, une Mercedes, de Benchicou «enlisée» dans la foule. Un cortège formé de plusieurs voitures s'ébranle vers la place de la liberté de la presse, au boulevard Hassiba Ben Bouali. A une centaine de mètres avant d'arriver sur les lieux, une marche est improvisée, toujours avec les mêmes slogans du mouvement citoyen. La foule devient plus compacte et avec la même bousculade, Benchicou monte les escaliers et dépose une gerbe de fleurs, inaugurant ainsi la première manifestation au niveau de cette place dédiée à la liberté de la presse. Puis, le cortège regagne la place du 1er mai, plus précisément devant le garage de l'Etusa pour déposer une autre gerbe de fleurs à la mémoire de la journaliste fauchée par un bus fou, le 14 juin 2001 devant ce garage et à la mémoire de toutes les victimes du mouvement citoyen. Encore une fois, une autre marche a été improvisée sous le regard alerte de nombreux policiers en civil qui accompagnaient la foule jusqu'à son entrée à l'intérieur de la maison de la presse Tahar-Djaout. Sous les chants du rebelle Matoub Lounès assassiné en juin 1998, Benchicou regagne, d'abord, le siège du Conseil de l'ethnique et de la déontologie où a élu domicile, depuis 2004, «le Comité pour la libération de Benchicou», puis le siège du Soir d'Algérie où il a reçu certains directeurs de publication venus lui exprimer leur solidarité confraternelle. Il s'agit notamment de Fouad Bougahnem du Soir d'Algérie, Ali Ouafek de Liberté et Ahmed Fattani de L'Expression. Après une heure de pause, Mohamed Benchicou a été invité à regagner la scène pour remettre le prix portant son nom à Ali Lemrabet, le journaliste marocain et le correspondant d'El Khabar, M.Larabi. C'est ainsi que se sont déroulées les premières heures de la liberté retrouvée du directeur du journal «Le Matin» qui a cessé de paraître depuis 2004 mais qui a publié une édition gratuite pour cette occasion. «Libre et intact», a été le titre de ce tirage spécial.