Les cours de l'or noir sont en état de grâce. Ils sont nettement au-dessus de leur niveau du printemps 2008. Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en août, référence du pétrole algérien, affichait 124, 92 dollars, hier aux alentours de 15h00, soit 2,65 dollars de plus que la séance de la veille. Le baril de West Texas Intermediate américain pour livraison en juillet gagnait pour sa part 2,34 dollars à 123,27 dollars. Le baril de Sahara Blend, pétrole algérien, a affiché 126,10 dollars, hier, en début d'échanges, selon le site spécialisé «Oilprice». Ce qui en fait un des bruts les plus chers du panier de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) en ce mois de juin. Une performance qui le place de surcroît parmi les matières premières les plus chères au monde. Des paliers exceptionnels si l'on en juge par la conjoncture actuelle du marché de l'or noir qui, en apparence, ne prédispose pas le baril à culminer à de tels sommets. Une récession économique sévère et une inflation record se profilent dans les pays industrialisés gros consommateurs d'or noir (Etats-Unis, Allemagne, France...). Ce qui avait secoué lundi dernier à ce titre les places boursières mondiales dans le sillage d'une hausse de la devise américaine. Seul le pétrole avait montré une résilience à toute épreuve malgré l'annonce par Pékin d'un énième dépistage général dans le district le plus peuplé du centre-ville de la capitale chinoise, après un regain épidémique qui a entraîné le retour de restrictions anti-Covid-19. Les experts ont unanimement souligné cette résistance. «Le brut est bien la seule chose au monde qui soit restée en hausse aujourd'hui, tout le reste chute», a noté Matt Smith analyste pour Kpler. «Un cercle vicieux de ventes a englouti les marchés et pourtant le pétrole s'est accroché», a-t-il poursuivi. «Malgré un retour des restrictions sanitaires en Chine qui risquent d'avoir un impact sur la demande, et les craintes croissantes d'un ralentissement de l'activité économique mondiale, la perspective d'une récession devenant de plus en plus probable», les prix de l'or noir se maintiennent à un niveau très haut, a fait remarquer Sophie Lund-Yates, analyste pour Hargreaves Lansdown. Comment expliquer donc cette tendance haussière? «C'est grâce à l'offre restreinte que les prix du Brut se montrent capables de se maintenir», assure Carsten Fritsch, analyste du second groupe bancaire allemand Commerzbank. Plus d'un million de barils par jour libyens manqueraient à l'appel. La production du pays était actuellement amputée de 1,1 million de barils par jour, a déclaré, le 13 juillet le ministre libyen du Pétrole et du gaz, Mohamed Oun, à l'agence Bloomberg. Deux ports clés dans l'est du pays ont été forcés de fermer par des manifestations alors que de violents affrontements entre groupes armés ont éclaté dans la nuit de vendredi à samedi dans la capitale libyenne Tripoli, sur fond de crise politique majeure, rapporte-t-on. Les combats, d'une grande intensité, ont opposé deux influentes milices de l'Ouest, faisant un mort parmi les combattants et d'importants dégâts matériels, a indiqué une source du ministère libyen de l'Intérieur. «L'offre est étouffée par la réduction des exportations de pétrole libyen dans un contexte d'agitation politique (...), tandis que le pétrole russe est confronté à des interdictions de grande envergure», résume Sophie Lund-Yates. C'est dans ce contexte que l'Opep s'apprête à publier ses prévisions pour 2023. L'Organisation des pays exportateurs de pétrole s'attend à une augmentation d'environ 2 millions de b/j de la demande mondiale selon un rapport qu'elle ne rendra public que le 12 juillet.