La chari'a ne consiste pas à couper la main des voleurs. Quelle est la place de l'islamisme (ou islam politique) dans le monde contemporain? On attendait au tournant la réponse de M.Boudjerra Soltani sur cette question doctrinale, et le moins qu'on puisse dire c'est que le leader du MSP est sorti des sentiers battus, pour nous livrer une définition, somme toute, originale. Pour lui, c'est simple: l'islamisme politique n'existe pas, pour la bonne raison qu'il n'y a qu'un seul islam, c'est celui de la justice sociale. En d'autres termes, il n'est pas pensable, comme le font certains, de saucissonner l'islam en petites tranches : islam politique, islam économique, ou autres. Boudjerra Soltani nous surprendra encore plus en abordant la situation qui prévaut en Irak: Il existe une résistance en Irak, c'est vrai, mais certains se cachent sous le manteau de l'islam pour commettre des actes terroristes et cela, le cheikh le condamne: «Nous ne pouvons cautionner l'action de ceux qui tuent des femmes et des enfants innocents.» Une telle distinction permet de séparer le bon grain de l'ivraie, et, dans la bouche de M.Soltani, qu'on aurait loisir à classer dans la catégorie des islamistes Bcbg, comme d'autres épinglent une nouvelle espèce de papillon dans une collection d'insectes, la précision vaut le détour. Il y a donc ainsi des idées reçues, profondément ancrées, et qui font que le concept d'islam politique, employé à toutes les sauces, est galvaudé. Les déclarations de Boudjerra Soltani sur le sujet ne sont pas un coup de tonnerre dans un ciel serein, mais elles ont au moins le mérite d'apporter des clarifications et de déblayer le terrain à une réflexion plus approfondie, d'autant plus que le président du MSP va plus loin sur un autre sujet: celui de l'application de la chari'a: «Cette dernière, affirme-t-il, ne consiste pas dans notre esprit à couper la main du voleur, mais à créer les conditions économiques et sociales pour qu'il n'ait pas à commettre des actes répréhensibles». En citant au passage Omar Ibn Khettab, qui fut confronté au même dilemme. Interrogé sur l'ouverture audiovisuelle et sur la levée de l'état d'urgence, le leader du MSP se prononce pour «une démocratie et une ouverture tous azimuts». Tout comme il considère qu'on ne peut pas garantir la démocratie sous l' état d'urgence: «On est toujours dans la période de transition», et il affirme ne pas comprendre les motivations qui poussent le pouvoir à verrouiller le champ médiatique, tout en tenant à se démarquer de certains «dérapages» des journalistes, notamment pour ce qui est de certains écrits le visant directement: «Je ne comprends pas pourquoi un journaliste ne vérifie pas une information avant de la balancer!». Ces positions, Boudjerra Soltani les défend en partant du fait que l'islam est contre toutes les injustices et contre la dictature: «La démocratie et le pluralisme autorisent la création de partis, d'ONG, d'association, de chaînes de télévision, de journaux». Tant que ces libertés ne sont pas garanties dans les textes et dans les faits, il considère que l'Algérie a encore du chemin devant elle sur la voie de la démocratisation.