Le scénario tant redouté s'est produit. Ce fut une nuit sombre, triste et pleine d'hystérie. Vingt-trois heures trente cinq de la soirée de ce mardi 4 juillet, les Allemands venaient d'apprendre la mauvaise nouvelle. La Nationalmannschaft n'ira pas le 9 juillet au stade de Berlin pour jouer la finale. Le rêve de devenir champion du monde s'est vaporisé à la 119e minute. Les gars de Klinsmann viennent d'être battus par les Italiens sur le score de 2 à 0. L'Allemagne est en deuil. La tristesse s'installait sur les visages de milliers de supporters à Berlin. Cette ville a vécu, enfin, une nuit calme. Avant le match la fête était grandiose dans Berlin. Les supporters ne parlaient que de victoire. Des chapeaux aux couleurs noire, rouge et jaune sur la tête des uns, des colliers de fleurs aux mêmes couleurs au cou des autres. Et tout le monde de scander «Deutschland, Deutschland!». La fête est grandiose, l'ambiance à son comble. Tout le monde chante, tout le monde trépigne au rythme d'un tam-tam africain. «On se prépare à fêter la victoire», déclare la jeune Tanja (17 ans). Mais au bout de trente minutes de jeu, l'équipe allemande ne trouve plus ses repères devant une équipe italienne très bien organisée sur le terrain. L'absence de Frings a laissé un grand vide. Ballack n'a pas pu faire seul la différence. Le duo Klose-Podolski n'inquiète plus le gardien Buffon. Au contraire la menace de la Squadra Azzura se précise. Les joueurs de Lippi Marcello multiplient les occasions. L'inquiétude et le stress envahissaient alors l'esprit des supporters. Sa joue sur la main droite, la mâchoire tremblante, Michael souhaite que le cauchemar cesse. «J'espère que ça ne va pas continuer ainsi», a-t-il souhaité. A une minute de la fin des prolongations, les deux équipes ne trouvaient plus le chemin des filets. Tout le monde se préparait pour les tirs au but. Les Allemands sont confiants qu'ils vont se qualifier après. «On a un très bon gardien, il peut arrêter au moins deux tirs», calcule déjà Moliane (22 ans). L'Italie ne pouvait pas attendre les tirs au but pour battre l'Allemagne. Un silence quasi sépulcral s'instaure à la 119e minutes, quand se produit le scénario tant redouté. Fabio Grosso a coupé le souffle à 80 millions d'Allemands. L'Italie a marqué et prend l'avantage. «C'est incroyable!», s'exclame Marriene, âgée d'environ vingt ans. Berlin sombre dans une atmosphère de deuil. Tout le monde rumine en silence. On ne s'adresse plus la parole, on a cessé d'avaler des frites et de lamper des cannettes comme le veut la tradition. «Je ne peux pas concevoir que nous soyons éliminés», lâche Marriene, la tristesse marquant désormais ses traits. Et d'ajouter: «Non, ce n'est pas possible! Je rêve». Deux minutes plus tard Del Piero enfonce le rêve de la jeune Marriene. Il a enterré l'espoir de tous les supporters. Ce n'est pas un rêve mais l'Allemagne est éliminée. La jambe gauche tremblote, la tête baissée, le drapeau pour sécher les larmes qui coulent de ses yeux noisette, Marienne ne voit plus la vie avec les deux belles couleurs du drapeau national, le jaune et le rouge, elle ne garde que le noir. Le ciel est tombé. La plus longue nuit berlinoise de l'année ne fait que commencer. La plupart des supporters ne voulaient plus parler aux journalistes qui les sollicitent dans tous les quartiers. «Que voulez-vous que je vous dise? Imaginez que votre équipe nationale est éliminée à ce stade de la compétition sur son sol, qu'allez-vous ressentir?», répond un jeune Allemand d'une trentaine d'années. Une réponse qui veut tout dire. Avec plus de calme le même jeune livre ses impressions. Il est plus logique et plus raisonnable cette fois-ci: «Comme chaque Allemand je suis triste et déçu, mais j'avoue que les Italiens étaient supérieurs. Nos jeunes n'ont pas pu faire face à l'expérience italienne», a-t-il reconnu. Et d'ajouter: «Contre l'Argentine on s'est qualifié de justesse, mais cette fois-ci on est mis en échec. Mais ce qui me fait encore plus mal c'est la manière avec laquelle on est éliminés, c'est-à-dire dans les deux dernières minutes des prolongations». La porte de Brandeburger Tor (La porte de Brandeburg), qui a toujours été un lieu de rassemblement des supporters allemands après la victoire, a été un carrefour, cette fois, où les supporters se sont séparés et que chacun est rentré chez lui. Malgré l'élimination et la grande déception, les supporters en sont tous convaincus, l'Allemagne tient désormais une équipe qui fera mouche dans l'avenir. «Nous sommes éliminés aujourd'hui, mais nous avons gagné une équipe jeune pour demain», constate un autre supporter, qui digère comme il peut l'élimination de son équipe nationale.