Le risque c'est d'aller à nouveau vers une autre phase d'incertitude qui arrange le Palais royal. Lors d'un laïus prononcé hier à l'université d'été du Front Polisario à Alger, le président de la Rasd, Mohamed Abdelaziz, est allé l'encontre de toutes les nouvelles suggestions du Palais royal. Pas d'autonomie ni de concessions à faire sur le droit à l'autodétermination. D'un air révolté, Mohamed Abdelaziz exprime la lassitude de tout un peuple qui «ne croit plus à un statu-quo et un mensonge qui dure depuis trente années». «Petit, grand ou pauvre peuple, les Sahraouis ne sont et ne seront jamais Marocains», réplique le premier homme du Polisario à toutes les thèses nouvellement inventées par le royaume chérifien. L'orateur a été d'une rare virulence à l'adresse du Maroc et ses alliés, français et espagnol. Selon lui, les trois alliés font de la pression dans toutes les cours afin d'envenimer le conflit et convaincre d'autres pays que la marocanité du Sahara est indiscutable, le plus grand mensonge de l'histoire qui rappelle celui de l'Algérie française, d'après Mohamed Abdelaziz. Ce dernier s'interroge sur le pourquoi de l'entêtement de Rabat et les tergiversations des instances onusiennes. Pourtant, lorsqu'il s'agissait de résoudre d'autres conflits, à l'instar de celui du Timor, les Nations unies ont appliqué, sans trop de problèmes, le droit international. Pis encore, l'ONU est allée jusqu'à écraser ses propres résolutions qui consacrent le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. L'équation n'est pas aussi complexe, l'ONU aurait pu imposer des sanctions légales contre le Maroc, comme cela a été fait illégalement contre Cuba. De toute évidence, la solution à la question sahraouie suppose un ratissage diplomatique plus large et des discussions élargies sur plusieurs fronts. Il est vraisemblable aussi que la question sahraouie est similaire à celle de la Palestine. Dans les deux cas, à chaque fois qu'une solution est suggérée pour juguler le problème, la France oppose son veto pour ce qui est de la Rasd et les USA pour éviter une solution à la crise palestinienne. L'indépendance de la République sahraouie n'arrange pas la France et l'Espagne qui sont les premiers consommateurs du phosphate sahraoui. En contrepartie, le Maroc est le grand bazar des produits français et espagnols. Le risque c'est d'aller à nouveau vers une autre phase d'incertitude qui sera profitable au Palais royal qui s'enlise dans sa politique du fait accompli, face au mutisme complice des Nations unies. Le président de la Rasd s'est montré déterminé à conduire très loin encore la lutte du peuple sahraoui. Il se réclame, par ailleurs, plus acharné contre l'idée que l'Algérie, de par son soutien indéfectible à la cause, ambitionne une issue sur l'atlantique. «Si cela était vrai, l'Algérie aurait négocié le partage du gâteau avec le Maroc ; c'est un mensonge destiné à la consommation internationale et à la propagande», soutient Mohamed Abdelaziz. Il a renchéri sur sa lancée pour dire que l'Algérie est le premier allié de la Rasd qui n'a cessé de manifester sa disponibilité à accompagner le Sahara post-indépendant. Demeure l'autre question pendante qu'est l'édification du Maghreb arabe, un projet conditionné par le recouvrement du peuple sahraoui de son droit à l'indépendance. «Nous sommes prêts à reconstruire l'UMA avec les autres parties concernées dans le respect mutuel et la sécurité. Toutefois, cela ne se fera jamais au détriment du peuple sahraoui», explique Mohamed Abdelaziz, position qui est d'ailleurs sur la même longueur d'onde que l'Algérie.