La conjoncture sociale et politique a tendance à reléguer le discours des archs au second plan. La reprise du dialogue entre le gouvernement et les archs semble sérieusement compromis, après la déclaration du ministre de l'Intérieur sur l'un des points essentiels de la plate-forme d'El Kseur. En effet, en annonçant le retour des gendarmes en Kabylie, sans apporter la moindre information sur l'état d'avancement des plaintes déposées par les familles des victimes du Printemps noir, contre certains gendarmes impliqués dans la mort de plus d'une centaine de manifestants, Zerhouni enfreint, quelque part, un engagement pris par l'Etat algérien dans le cadre du dialogue gouvernement-mouvement citoyen. Et pour cause, à l'occasion du premier dialogue initié entre le gouvernement Benflis et les archs conduits par Allilouche, plusieurs brigades de gendarmerie ont été délocalisées. La reprise des pourparlers entre les archs et Ahmed Ouyahia devait en principe déboucher sur un retrait total de tous les gendarmes de kabylie. Une revendication consignée noir sur blanc par la plate-forme d'El Kseur, un document «scellé et non négociable» que le gouvernement s'est engagé à mettre en oeuvre. Il faut dire que la conjoncture sociale et politique, quelque peu fébrile, a tendance à reléguer le discours des archs au second plan des préoccupations immédiates des Algériens que sont les salaires. Seulement, il y a lieu de reconnaître que ledit dialogue a bel et bien constitué l'un des épisodes majeurs de la vie de la nation. Ainsi, tant du côté du gouvernement que de celui des archs, l'on a eu la sagesse de ne pas remettre en cause les acquis d'un dialogue qui, faut-il le souligner, a permis d'entrevoir la fin d'une crise qui a mis à genoux une importante région du pays. La Kabylie, jadis au bord de l'explosion, a retrouvé ces dernières années quelques couleurs. Le dialogue a servi aussi à dépassionner les relations entre la Kabylie et le pouvoir central, voire casser de nombreux tabous. Les deux parties ont donc laissé le temps faire son oeuvre et c'est tant mieux. Cela dit, le discours ne nourrit pas son homme. Les citoyens de cette région sont certes très sensibles aux progrès constatés dans la prise en charge de la question identitaire. Ils le seront encore plus lorsque l'Etat se sera engagé à faire de tamazight une langue officielle dès que les conditions le permettront. Mais leur premier souci actuellement est celui de tous les Algériens, à savoir pouvoir vivre et travailler chez eux, en toute sécurité. Le gouvernement, par la voix du ministre de l'Intérieur tranche la question et répond à leur préoccupation sans faire référence à la plate-forme d'El Kseur. La sortie de Zerhouni met donc un terme à un dialogue qui, faut-il le constater, se termine en queue de poisson. On est loin du discours de Ahmed Ouyahia devant l'APN. L'ancien chef du gouvernement avait déclaré en substance que la crise de Kabylie était une bombe à retardement et seul un dialogue avec le mouvement citoyen permettrait de la désamorcer. Deux ans plus tard, le pouvoir «change d'avis».