La militante française des droits de l'homme, Claude Mangin, a exprimé ses craintes quant à l'état de santé des prisonniers sahraouis dans les geôles du colonisateur marocain, où ils sont «maltraités de manière systématique». Dans un entretien accordé à l'APS, Mme Mangin est longuement revenue sur la situation des prisonniers sahraouis dans les geôles du colonisateur marocain. Elle a fait part des entraves dressées par le régime du Makhzen pour l'empêcher de voir son mari, le prisonnier sahraoui Naama Asfari, qu'elle n'a pu approcher depuis 4 ans. «Mon mari et ses compagnons du groupe de Gdeim Izik incarcérés depuis près de 12 ans -ils sont actuellement encore 19- et tous les autres prisonniers sahraouis sont maltraités de manière systématique dans les prisons marocaines, et ce depuis toujours», a-t-elle témoigné. Elle a dit être particulièrement inquiète pour la santé de trois étudiants sahraouis emprisonnés depuis 7 ans et condamnés à de lourdes peines (15, 12 et 10 ans de prison ferme), en grève de la fin depuis le 20 février. «Le Maroc doit être obligé de lever cet état de siège permanent qu'il a mis, depuis 2014, autour du Sahara occidental occupé», a affirmé Mme Mangin, au moment où le Haut Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Volker Türk, vient d'indiquer que le bureau qu'il dirige depuis 2022 n'a pas effectué de mission au Sahara occidental depuis huit ans, soulignant qu'il était très important d'être en mesure de le faire à nouveau. Rappelant que le Comité onusien contre la torture et le Conseil des droits de l'homme des Nations unies ne cessent de condamner Rabat depuis plus de 10 ans, Claude Mangin s'est félicitée de l'adoption, en janvier dernier par le Parlement européen, d'une résolution condamnant le Maroc, pour la première fois en 25 ans, pour, entre autres, atteinte à la liberté d'expression et à la liberté de la presse. La militante, à l'occasion d'une visite dans les camps de réfugiés sahraouis, a néanmoins regretté que cette résolution n'ait pas évoqué la question du Sahara occidental. Mme Mangin a indiqué qu'il y a eu plusieurs articles dans des journaux comme l'Humanité et Marianne pour dénoncer le black-out sur la question sahraouie. D'autre part, elle a estimé que l'année 2023 sera «décisive» pour la cause sahraouie, puisque la Cour européenne de justice (CJUE) doit statuer définitivement sur les accords de libre-échange entre le Maroc et l'UE, étendus illégalement au Sahara occidental occupé. Elle a fait savoir que les décisions de la CJUE seront «définitivement approuvées» et «exécutoires». «La Cour doit rendre ses décisions fin 2023. On va pouvoir attaquer le Maroc sur ce pillage systématique des ressources naturelles, un crime de guerre selon les conventions de Genève», a-t-elle soutenu. Elle met l'accent sur le fait que «le Maroc ne pourra plus financer sa politique de colonisation systématique». Sur un autre registre, Mme Mangin a indiqué que les révélations sur l'utilisation par le Maroc du logiciel espion de fabrication sioniste Pegasus, en juillet 2021, avait constitué un «moment de rupture» pour les journalistes français, devenus plus enclins à s'intéresser à la question sahraouie après un black-out total. Selon elle, espionnée aussi, le dépôt de plaintes contre les médias ayant révélé l'utilisation par le régime du Makhzen de Pegasus a été à l'origine de la quête de vérité. Elle fait savoir, à ce titre, qu'elle avait organisé, trois mois après, une mission européenne de sept rédactions françaises dans les Camps de réfugiés sahraouis pour «voir la façon dont les Sahraouis vivent et construisent leur Etat ainsi que la façon démocratique qu'ils ont de gérer leur société». Mme Mangin a, en outre, indiqué qu'après avoir été débouté de la plainte en France contre les médias et journalistes français, le Makhzen se démenait pour nier tout espionnage. Mme Mangin a qualifié aussi de «courageux» les Marocains en exil, victimes du logiciel espion Pegasus, qui se sont joints aux poursuites judiciaires intentées aux Etats-Unis par Meta contre la société sioniste NSO. «Cela veut dire que ces Marocains n'ont plus peur et qu'ils ont désormais la force et le courage de dénoncer le Maroc depuis leur exil (ce qui) est assez nouveau car ils ont peur des représailles que peuvent subir leurs familles restées au pays», a-t-elle opiné.