Le corail rouge a engendré et développé un marché illicite prospère. Quatre tonnes de corail rouge, dont la valeur est estimée à 600 millions de DA, sont annuellement braconnées et prennent le chemin d'une filière mafieuse organisée par des réseaux internationaux. Cette filière, qui écume le pourtour du Bassin méditerranéen, opère selon un scénario bien huilé: les Espagnols sont chargés de la récolte, les Tunisiens de son acheminement et les Italiens de sa transformation et de sa commercialisation. S'il est un secteur -qui est à la peine et qui éprouve des difficultés- à prendre son essor, c'est bien celui de la pêche et des ressources halieutiques. Les 1200km qui forment les côtes algériennes ne donnent pas l'impression que l'on veut faire de ce département un facteur prioritaire du développement économique. Le manque de performance du secteur de la pêche n'est, en fait, que la face cachée de l'iceberg puisque le problème que pose le pillage du corail rouge, en particulier dans la région d'El Kala, a pris des proportions tellement alarmantes qu'il a fini, enfin dira-t-on, pour attirer l'attention des pouvoirs publics qui en ont interdit l'extraction jusqu'en 2015. Recherché tant en joaillerie que par le secteur de la médecine, le corail rouge, en particulier (corallium rubrum) a engendré et développé un marché illicite prospère et rendu quotidienne la pratique de sa pêche. Objet de convoitises par pratiquement toutes les nationalités du pourtour du bassin méditerranéen: tunisienne, italienne, espagnole, marocaine...Il est la cible de réseaux mafieux internationaux. Ces états de fait appelent au moins à un double constat. Celui de la préservation des richesses de la faune et de la flore marines ainsi que celui de la surveillance des côtes algériennes. Des mesures draconiennes de ce qui est caractéristique du crime économique s'imposent. En 2004, les services de répression de la Douane et de la Gendarmerie nationale ont saisi près de 200kg de cette précieuse ressource. 600kg de corail rouge ont fait l'objet de saisies l'année dernière et près d'une centaine de trafiquants de diverses nationalités ont été neutralisés. Un trio de trafiquants composé d'un Algérien et de deux Tunisiens ont été appréhendés en possession de 170kg de cette marchandise estimée à près de 1700 euros, elle devait être acheminée en direction de la Tunisie. Un maigre butin comparativement aux 400kg retirés des récifs coralliens algériens, mutilés par la pratique d'une pêche sauvage dont les techniques utilisées provoquent des dégâts que la nature aura bien du mal à réparer. Arraché au moyen de herses, croix de Saint André, auxquelles sont rattachés des filets qui peuvent descendre jusqu'à 100 mètres de profondeur, le corail ainsi «récolté», subit des agressions qui perturbent sa régénérescence, sachant qu'il ne peut croître que quelque 6cm par an au maximum. Pêché jadis, à l'aide d'un marteau effilé, il faisait l'objet de la plus grande attention de la part des plongeurs qui s'adonnaient à cette activité. Estimé à 150.000 DA le kilo, le corail constitue à El Kala, une activité économique lucrative. Si elle permet à certains, tout juste d'en vivre, elle a permis à d'autres, de faire fortune. L'appât de gains conséquents a poussé à une exploitation anarchique et effrénée de cette ressource qui n'est pas inépuisable, si elle continue à s'exécuter dans un cadre illégal et inorganisé. Premier producteur de corail rouge dans le Bassin méditerranéen, l'Algérie ne profite pas de cette manne providentielle et le préjudice porté à son économie et à son écosystème sont considérables. L'étude confiée à trois organismes, français Comex, Creocean ainsi qu'au Centre national (Français) de la recherche scientifique, (Cnrs) met le doigt sur la spécificité multidisciplinaire que nécessite l'évaluation et la distribution de l'état des récifs coralliens du littoral algérien. Le ministre de la Pêche et des Ressources halieutiques a annoncé, tout récemment, que l'étude est entrée dans sa phase II et qu'un plan d'aménagement du territoire et d'exploitation des ressources corallifères a abouti à la répartition en 5 zones de pêche du corail rouge. Selon un système de bande alternée, une seule zone sera fonctionnelle sur une période pouvant s'étaler jusqu'à 5 ans tandis que les autres prendront le temps de se régénérer. L'autorisation de la pêche du corail rouge est annoncée pour le mois d'avril 2007. Espérons que des mesures concrètes de lutte contre les réseaux mafieux de la filière de «l'or rouge» ont été prises pour que cette ressource de développement durable puisse croiser le regard des générations futures.