Pour un journal aussi important, il n'est pas évident de supposer que son enquête soit le fait du hasard. Le très influent quotidien américain The Washington Post, enquête sur les six Algériens incarcérés à Guantanamo. Il n'y a pas de fumée sans feu. Pour un journal aussi important, il n'est pas évident de supposer que son enquête soit le fait du hasard. Les Algériens de nationalité bosniaque détenus à Guantanamo avaient été blanchis et libérés par la justice bosniaque avant d´être appréhendés ensuite par les forces américaines. The Washington Post est revenu avec plus de détails sur les conditions d'enlèvement de ces Algériens après avoir été libérés par la justice bosniaque. Les six Algériens de Guantanamo étaient accusés de vouloir commettre des attentats contre les ambassades américaine et britannique. Ecroués depuis octobre 2000 à Sarajevo, ils avaient été innocentés par la justice bosniaque, mais à leur sortie de prison, ils ont été immédiatement déportés par les Américains à Guantanamo, rapporte The Washington Post. Selon l'enquête du même journal, le Premier ministre bosniaque a demandé, l´année dernière, à l´administration Bush de libérer les six détenus, jugeant le cas comme une injustice. «Les Etats-Unis les classifient toujours en tant que combattants ennemis » dans leur guerre contre le terrorisme», précise l'enquêteur du Washington Post. Selon le journal américain, il existe encore quelque 450 détenus à Guantanamo. Certains d'entre eux «font face aux commissions militaires». D'autres pourraient être extradés vers leurs pays d´origine. Mais les six Algériens, à en croire l'enquêteur, ne seront jamais autorisés à retourner en Bosnie qui leur avait accordé la citoyenneté. Au lieu de cela, ajoute The Washington Post, «les USA ont demandé à l´Algérie de rapatrier les prisonniers à condition qu´ils soient mis sous surveillance». Laisser partir les prisonniers librement serait une reconnaissance d´une erreur grave, d'après le journal qui a pris le soin d'interroger les avocats des détenus. Le premier Algérien recherché après les attaques terroristes du 11 septembre 2001 est surnommé Abou Maâli. «Un vétéran des conflits en Algérie, en Afghanistan et aux Balkans. il est connu pour être un proche d´Al Qaîda. Le 8 octobre. 2001, la police bosniaque a détenu un Algérien, Belkacem Bensayah, qu´elle a cru être Abu Maâli». Bensayah, d'après les investigations des services de sécurité américains, avait appelé en Afghanistan 70 fois après le 11 septembre et avait été accusé d´être «le facilitant supérieur d'Al Qaîda» en Bosnie. Les enregistrements téléphoniques n´ont pas été publiquement révélés. La police s'était focalisée sur un autre suspect algérien, Saber Lahmar, à en croire The Washington Post. Selon les mêmes enregistrements, la police a décrypté un entretien codé au sujet d'un plan pour attaquer l'ambassade des Etats-Unis et l'ambassade britannique à Sarajevo. Le jour suivant, des diplomates américains, ainsi que des fonctionnaires de la CIA et du FBI ont informé leurs collègues en Bosnie qu'un complot se préparait..C'est ainsi que les ambassades ont été fermées. Au cours de la semaine suivante, la police bosniaque a arrêté Lahmar et quatre autres Algériens, en l'occurrence Hadj Boudella, Mohamed Nechle et Lahkdar Boumediene. Par ailleurs, le 17 janvier 2002, la Cour suprême de Bosnie a ordonné la libération des six Algériens prétextant l'absence de pièces à conviction suffisantes pour leur inculpation. Le même jour, la Chambre bosniaque des droits de l´homme a publié une décision permettant aux Algériens de rester en Bosnie et de ne pas être expulsés. Peu avant l´aube, le 18 janvier, les Algériens ont été officiellement libérés. Mais au lieu de retrouver leur liberté, ils ont été remis par la police bosniaque aux militaires américains, raconte l'enquêteur du Washington Post. L'enquête du journal américain n'est pas innocente, mais l'on s'interroge si le Washington Post est en mesure d'aller à l'encontre de la stratégie d'Etat de lutte antiterroriste? Un pays où même la justice, qui se réclame indépendante, préfère se qualifier d'apolitique pour éviter le casse-tête de Guantanamo. En dépit des critiques et de la pression internationale, les Américains s'entêtent à ne pas fermer les portes de cette prison de la honte, objet de plusieurs condamnations.