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«Nous voulons le retour du FIS»
MADANI MEZRAG FAIT MONTER LES ENCHÈRES
Publié dans L'Expression le 30 - 08 - 2006

Il revendique un texte plus fort qui consacre une amnistie générale et un retour de l'ex-FIS sur la scène politique.
Six mois après la mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, l'ex-chef de l'Armée islamique du salut (AIS), Madani Mezrag, considère que l'application de ce «plan de paix est loin d'être concrétisé sur le terrain». Il revendique ouvertement un texte plus fort, qui consacre une amnistie générale qui, en toile de fond, permettra un pardon sans condition, mais surtout un retour de l'ex-FIS sur la scène politique. L'orateur, s'adressant aux représentants des médias, refuse tous les délais fixés aux terroristes toujours en activité. D'après lui, «la Charte n'est qu'une partie du processus de réconciliation qui a démarré par une trêve» et qui devra, impérativement, aboutir, selon lui, à «une amnistie générale et le recouvrement par les frères de tous leurs droits civiques et politiques».
L'ex-chef de la branche armée du FIS dissous va carrément à contre-courant de ce que stipule la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Car le texte n'a, à aucun moment, prévu une amnistie générale et encore moins un éventuel retour du Front islamique du salut sur la scène politique. Ainsi, six mois plus tard, Madani Mezrag critique la Charte qui, à l'en croire, a complètement négligé le volet politique de la crise. C'est ainsi qu'il conditionne la réussite de la Charte par une amnistie et un nouvel agrément au profit de l'ex-FIS.
Le conférencier ira encore plus loin. Il affirme que la Charte incrimine l'ex-FIS et évacue la responsabilité de l'Etat dans la crise des années 1990. Il s'est, néanmoins, quelque peu ressaisi en réaffirmant son soutien à la démarche du président. Il explique cela par «une profonde conviction» que le chef de l'Etat «avait l'intention d'aller très loin dans son projet de paix». Cela, a-t-il expliqué, «en dépit de nos propositions qui n'ont pas été prises en charge.» A l'origine de la non-concrétisation des textes de la Charte, s'est-il insurgé, «une administration bureaucratique, manipulée et gérée par Hizb França.» Il ne mâche pas ses mots quand il est interrogé sur l'existence d'un éventuel blocage dans l'application du projet de la Charte.
Il n'hésite pas, non plus, de pointer un doigt menaçant, refusant, après des années de sang et de terreur, toute appellation de terroriste, préférant parler de «victime d'une tragédie nationale.»
Dans la foulée, il tire à boulets rouges sur la commission nationale et ses démembrements régionaux chargés de mettre en oeuvre les textes de la Charte, les qualifiant de cellules manipulées pour le blocage de l'opération de mise en oeuvre. Il déclare, sans ambages, que plusieurs dossiers n'ont même pas été examinés. C'est une réclamation directe énoncée à l'adresse du président de la République «afin qu'il reprenne en main le train de la réconciliation.» L'ex-chef de file de l'AIS se réfère toujours à l'accord qui, d'après lui, a été signé avec l'armée en 1997. A en croire l'orateur, ledit accord stipule une trêve et un cessez-le-feu conditionnés par l'amnistie de tous les éléments de l'ex-FIS sans fixer le moindre délai.
Vrai ou faux? En tout cas, le peuple algérien, victime de toute une décennie de sang et de feu, n'a jamais été mis au courant d'un tel accord.
Madani Mezrag s'est dit opposé à la «fermeture des portes du dialogue, car fixer un délai explique une mauvaise intention.»
L'interrogation qui s'impose est de savoir, pourquoi Madani Mezrag a soutenu la Charte d'autant plus qu'elle fixait les délais bien avant sa mise en oeuvre. Le chef de l'ex-AIS est allé encore plus loin en disant que la Charte n'offre pas les garanties nécessaires aux éléments armés toujours au maquis. Il suggère la création d'un mécanisme indépendant regroupant les partisans et les concernés devant veiller au suivi de l'application des textes de la Charte. Ce mécanisme, pense-t-il, doit être soutenu par un texte nouveau et «plus fort que celui de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale.» C'est la nouvelle revendication des anciens de l'AIS et la même de ceux qui sont encore au maquis.
D'après Mezrag, ceux-ci ne sont même pas convaincus par les textes de la Charte. Une manière, même indirecte, d'appuyer sa quête pour un texte nouveau qui n'est fixé par aucune échéance.
Quant aux derniers attentats terroristes perpétrés ces derniers jours dans certaines régions du pays, l'orateur estime «que ce ne sont, probablement, que des règlements de compte.» Si les islamistes et les anciens de l'ex-AIS semblent reprendre du poil de la bête au lendemain de l'expiration du délai de grâce attribué aux terroristes en activité, il n'en demeure pas moins que toute nouvelle décision est uniquement du ressort du chef de l'Etat. Il y a lieu de souligner que la sortie de Madani Mezrag intervient une semaine après celle de Anouar Haddam qui a, lui aussi, revendiqué le retour de l'ex-FIS sur la scène politique nationale. C'est même, selon lui, «une condition inaliénable pour l'établissement de la paix en Algérie». L'islamiste établi aux Etats-Unis a tenu les mêmes propos que l'ancien chef du bras armé de l'ex-FIS. En effet, tout en reconnaissant l'importance de la démarche présidentielle approuvée par les Algériens dans leur quasi- majorité, il a crié haut et fort que sans la renaissance du FIS, le projet de M.Abdelaziz Bouteflika aura un goût d'inachevé. Il semble donc que les islamistes radicaux agissent en concert dans le but de faire pression sur l'autorité politique avec l'objectif avoué de replacer l'ex-FIS sur orbite de la scène politique nationale.
Les dirigeants du parti dissous veulent, en fait, vider la Charte pour la paix et la réconciliation nationale de son essence, en imposant à la société des «prolongations» à la crise. La stratégie des Haddam et consorts tient d'une volonté de «brouiller» indéfiniment l'image de l'Algérie auprès des capitales occidentales, notamment.


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