Du 11 au 16 septembre prochain, Tanger accueillera le 4e Festival méditerranéen du court-métrage, organisé par le Centre cinématographique marocain (CCM). Bonne nouvelle ou pas? si l'on se réfère à cette présentation de la ville par Truman Capote: «Presque tout, à Tanger, est anormal et avant de partir, il vous faudra veiller à trois choses: vous faire vacciner contre la typhoïde, retirer toutes vos économies de la banque, dire adieu à vos amis..» Tiens, tiens, ça alors! Nos réalisateurs invités à y prendre part ont-ils réfléchi par deux fois avant de se décider? Peut-être que oui, peut-être que non...Mais enfin, qui pourrait refuser l'appel de la mer et du goût prolongé des vacances au soleil? Surtout quand on lit la suite: «Des plages magnifiques ; des étendues vraiment peu ordinaires de sable doux comme du sucre en poudre, et de brisants. Et si vous avez du goût pour ce genre de choses la vie nocturne, bien que ni particulièrement innocente ni spécialement variée, dure du crépuscule à l'aube.» Bien sûr qu'ils n'ont pas eu à réfléchir longtemps! Et comment! si l'on croit les propos de l'éditorialiste: «Dieu sait si vous ne les reverrez jamais (vos amis). Je parle sérieusement. Le nombre est alarmant, ici, des voyageurs qui ont débarqué pour un bref congé ; puis s'y sont établis; puis, ont laissé passer les années. Car Tanger est une rade, et qui vous enserre ; un lieu à l'abri du temps. Les jours glissent le long de vous, sans que vous les aperceviez plus que les gouttes d'écume sur une cascade...» Ah! que c'est beau de travailler, les pieds dans l'eau. J'espère que nos amis algériens nous enverront des cartes postales ! Et bien, oui ! Sur les 170 pays sélectionnés, dispatchés en 40 films en compétition, tous des films de fiction, produits entre octobre 2005 et juillet 2006, l'Algérie figure en bonne place avec trois courts-métrages des plus singuliers et innovants. Trois façons de filmer et de voir les choses. Trois réalisateurs. Enfin, trois angles d'attaque, et d'expériences diverses dans le milieu cinématographique, cependant liés par une seule passion, l'amour de l'image, du cinéma et de la réalisation. Trois réalisateurs à la veine contemporaine et au regard créateur acéré et moderne. Un souffle jeune pour notre cinéma algérien qui avait rudement besoin de ces talents. Les Baies d'Alger de Hassan Ferhani est une audioscopie en 14 minutes, de la population algéroise. Dans un long panorama de la ville, l'oeil de la caméra scrute différents bâtiments et quartiers du centre-ville dans une approche intimiste. Réalisé en 2006 Les Baies d'Alger est le premier court-métrage de ce jeune réalisateur en herbe de 21 ans et débordant d'intelligence. Son film donne à entendre et à saisir le pouls de la société algéroise de façon détournée, c'est-à-dire sans image, seul le son captant les discussions intra-muros parvient à nous donner la juste représentation. Son court-métrage entre dans le cadre d'un workshop organisé par Katia Kameli, (vidéaste, plasticienne et réalisatrice, Paris). Membre de l'association Chrysalide, Hassen Ferhani, a été assistant de première dans la nouvelle pièce de l'Association, Rêve et vol d'oiseau, (coproduction Chrysalide et la compagnie artistique de Lyon, Gertrude II ). Ce qu'on doit faire, de Karim Moussaoui est une fiction sombre tournée en hiver 2005, en pleine nuit, glaciale de surcroît. Hakim, alias Ahmed Ben Aïssa, entame une recherche dans les hôpitaux d'Alger pour trouver un homme qu'il a malmené en lui donnant des coups de poing le jetant à terre. Cette recherche le mène vers un lieu secret où il va avoir une rencontre inattendue. Ce cinéaste, au regard profond, possède déjà à son actif un autre court-métrage, intitulé Petit Déjeuner, inspiré d'un poème de J.Prévert. Il a obtenu le Prix du court-métrage au Festival de Timimoun en 2004. Egalement comédien, Karim Moussaoui vient de finir de tourner dans le nouveau film de Nadir Moknache, Délices Paloma aux cotés de Beyouna et Naida Kaci. Actuellement, il produit le court-métrage de Yanis Koucim appelé «Khti» On le retrouve aussi au théâtre puisqu'il a déjà participé à la pièce Homo-sapiens, mise en scène par Hajar Bali et produite en 2001 par l'association Chrysalide, dans laquelle il est membre actif. Il interprète aussi un rôle dans sa toute nouvelle pièce Rêve et Vol d'oiseau. Enfin, Pas d'humeur, de Hamid Saïdji raconte en 12 minutes l'histoire d'une femme qui tombe amoureuse d'un homme dès la première nuit. Le lendemain, un léger malentendu lui laisse croire qu'il ne partage pas ses sentiments. Un épisode trouble dans la vie d'une femme comme il peut en exister et arriver à plusieurs d'entre nous...d'où ce côté à la fois simple et attachant dans ce court-métrage qui flaire la complexité des sentiments, fait et défait les rapports avec toujours ce soupçon de vacuité et nonchalance humaine. Ce énième court- métrage a été réalisé par ce diplômé de l'Ecole des arts, section réalisation, de Columbia University (New York, USA) et de la London Metropolitan University, section arts visuels. Hamid Saïdj a aussi réalisé et produit une demi-douzaine de courts-métrages et documentaires qui ont été sélectionnés dans divers festivals (Tanger, Béjaïa, Venise, Barcelone, Manchester, Bogota). Il a obtenu le Prix du meilleur montage au Festival du documentaire de Bogota (Colombie). Polyvalent aussi, ce beau ténébreux a été également assistant à la mise en scène dans Rêve et Vol d'oiseau où il joue le rôle d'un malfaiteur...En attendant, c'est à Tanger que se rendront nos trois réalisateurs. C'est la Morsure du Citron de Jean-Francois Amiguet qui ouvrira le festival...Les débats de films auront lieu chaque matin à l'hôtel Chellah. La maîtresse des cérémonies d'ouverture et de clôture n'est autre que Madame Nouali. Des projections de courts-métrages marocains et méditerranéens, des tables rondes et rencontres sont également au programme de cette manifestation. Elle sera marquée, en outre, par l´attribution de six prix, à savoir: le Grand Prix du festival, Prix spécial du jury, Prix de la première oeuvre, Prix d'interprétation féminine, Prix d'interprétation masculine et la Mention spéciale du jury.