L'entrave est levée. La consultation des dossiers impliquant des mineurs est désormais autorisée par la France. C'est ce qu'indique un arrêté paru, hier, au Journal officiel de la République française. L'arrêté portant sur l'ouverture des archives de la guerre d'Algérie a été signé le 25 août en cours. Pour des médias français, il s'agit d'un «assouplissement» des modalités d'accès à ces archives ouvertes en 2021. Cette ouverture est néanmoins jugée «contraignante» jusque-là, vu que l'accès était encore difficile en raison, notamment d'une mesure fixant à 100 ans le délai de classification imposé pour les dossiers d'archives impliquant des mineurs. C'est- à- dire les personnes âgées de 21 ans et moins, selon la législation de l'époque des faits. Il est stipulé dans l'arrêté que la dérogation est destinée à «faciliter l'accès aux archives publiques produites dans le cadre d'affaires relatives à des faits commis en relation avec la guerre d'Algérie entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966 conservées aux Archives nationales, aux Archives nationales d'outre-mer, dans les services départementaux d'archives, dans le service des archives de la préfecture de police, dans les services d'archives relevant du ministère des Armées et à la direction des archives du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères». Sont concernés les documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions et à l'exécution des décisions de justice, les documents relatifs aux enquêtes réalisées par les services de la police judiciaire. L'article 2 du même arrêté mentionne que l'arrêté du 22 décembre 2021 «portant ouverture d'archives relatives à la guerre d'Algérie est abrogé». Pour rappel, les archives judiciaires français sur la guerre d'Algérie avaient été ouvertes en décembre 2021 «avec quinze ans d'avance», avait précisé l'Elysée. Cette démarche est intervenue dans le sillage du rapport établi par l'historien Benjamin Stora sur les questions mémorielles en lien avec la guerre d'Algérie. Cependant, cette ouverture n'était pas synonyme du libre accès à ces archives, ont regretté des historiens, côté français. «L'accès à ces documents restait toujours aussi difficile» pour les familles et les chercheurs, avait écrit dans une tribune dans Le Monde l'historien Marc André en novembre 2022. L'un des principaux obstacles était l'exclusion des dossiers impliquant des mineurs - les moins de 21 ans, en raison de la législation de l'époque -, toujours soumis au délai de classification de 100 ans. En raison de cette limitation, couplée à plusieurs autres, «la majorité des dossiers se referment», avait reproché l'historien. «Cette gestion bureaucratique conduit à ignorer la réalité d'une guerre menée par des jeunes. Cela est vrai tant dans l'immigration algérienne en France que dans les maquis, les réseaux urbains et les prisons où les indépendantistes, leurs soutiens, les réfractaires, les appelés avaient pour nombre d'entre eux autour de 20 ans lors de leur engagement», a expliqué le même historien. «Suffisamment majeur à l'époque pour avoir la tête tranchée, il est aujourd'hui suffisamment mineur pour voir son dossier soustrait de la dérogation générale», a fait savoir Marc André dont la quête a fini par aboutir. L'exclusion de consultation pour les dossiers impliquant un mineur est désormais levée. Cependant, les dossiers dont la communication «porte atteinte à l'intimité de la vie sexuelle des personnes» ou à «la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement» resteront «classifiés». C'est-à-dire, ils seront toujours interdits d'accès. Pour les médias français, «ce nouvel assouplissement s'inscrit dans la politique d'apaisement décidée par Macron durant son premier quinquennat, après les recommandations du rapport Stora sur le conflit mémoriel entre l'Algérie et la France sur le passé colonial». Une séquence qui intervient alors qu'entre les deux parties, le temps n'est pas à l'entente.